Le désir joue un rôle ambigu dans la vie de l’homme dans la mesure où d’un côté il vise un but qui lui apportera de la satisfaction, mais de l’autre lui fait ressentir un manque et s’accompagne donc de souffrance. Paradoxalement, le désir peut donc nous rendre malheureux alors qu’il vise le plaisir… De plus, il possède une incroyable force, et si l’on se jetait à corps perdu dans la satisfaction du plus grand nombre de désirs possible, cela pourrait nous entraîner à commettre des actes illégaux et immoraux et cela compromettrait aussi notre liberté de juger et d’agir sans contrainte. Ne devrions-nous pas, pour vivre sagement, librement et pour accéder au bonheur, limiter le pouvoir que nos désirs ont sur nous ? Ne faudrait-il pas tenter à tout prix d’agir sur eux pour nous libérer de leur emprise et nous sentir maîtres de nous ?
Nous allons voir que la lutte contre certains de nos désirs peut être encouragée dans un objectif de respect des bienséances et de vie en société, mais que le problème du rapport entre l’homme et ses désirs se pose : si nos désirs constituent notre essence et ont des effets bénéfiques sur nous, doit-on tout de même les réfréner pour chercher la maîtrise de soi avant tout ? Enfin, nous nous demanderons quelle attitude est-elle bonne de suivre vis-à-vis de nos désirs pour goûter au bonheur, et voir que la recherche de la modération n’est pas chose facile…
I. Lutter contre ses désirs permet le respect des bienséances
Tout d’abord nous sommes amenés à nous demander si nous ne devrions pas lutter contre certains de nos désirs pour vivre moralement et accéder à la sagesse. En effet, si la sagesse est modération et maîtrise de soi, vivre constamment emporté par ses désirs serait un frein pour accéder à cet idéal. L’homme possède toutes sortes de désirs parmi lesquels certains sont immoraux ou choquants, et il est légitime de se demander si ceux-ci ne devraient pas être réfrénés. Comment, par exemple, réussir à mener une vie vertueuse si l’on possède des envies de meurtre ou d’inceste ? Il apparaît naturel que tout homme réfléchi et voulant vivre dans la légalité va tenter d’évacuer ces désirs, tâche certainement compliquée et malaisée, mais partant de l’intention de « vivre comme il faut », donc louable. Prenons l’exemple d’un homme ayant des passions meurtrières ; soit il laisse libre cours à ses désirs, vivra oppressé par ceux-ci et passera certainement à l’action du fait de la puissance des désirs exacerbés, soit cet homme tente d’intervenir dans le domaine de ses passions à l’aide de sa raison et réussira peut être à s’interdire de suivre ce désir destructeur. Pour le cas des désirs extrêmes, néfastes ou contraires à la morale, on pense donc a priori qu’il est bon de les combattre pour se rapprocher au plus près de l’idéal de sagesse. Cependant il est très difficile d’observer ses désirs de manière neutre du fait du manque de recul que l’on possède vis-à-vis de soi-même, et encore plus complexe d’avoir un impact sur ceux-ci. Par exemple, est-il réellement possible d’ « effacer » un désir amoureux ? Celui-ci a tellement de puissance sur nous que nous ne pouvons qu’être sous son emprise…
En outre, il peut être dangereux de satisfaire ses désirs sans en envisager les conséquences. Nous sommes souvent tentés d’accéder au plaisir dès qu’il en est possible, et donc de suivre nos désirs sans réflexion, sans doute, sans remise en question ; plus dure en est la chute. En effet, entre une personne qui délibère et qui envisage les conséquences possibles d’un acte et une autre qui suit ses passions tête baissée, la deuxième sera forcément la plus déçue et désorientée si la situation s’avère être un échec. Dans ce cas, tenter de réfréner ses désirs peut être nécessaire pour vivre moralement et justement. La satisfaction de nos désirs devrait donc être discutée et réfléchie, il faudrait savoir s’interdire un plaisir si celui-ci sera source de complications, et donc lutter contre ces « faux » plaisirs. Ici encore se pose le problème de la pratique, est-il réellement possible de peser les bons et mauvais côtés d’un désir ? Ne trouvons-nous pas d’ailleurs que tous nos désirs sont bons ? Comme nous sommes notre propre référentiel, comment juger ce qui émane de nous-mêmes ? La difficulté est donc de distinguer parmi ses désirs lesquels méritent d’être réalisés et ceux qui ne nous apporteront rien de bénéfique, ou seulement un plaisir éphémère suivi de conséquences néfastes.
De plus, l’homme civilisé doit réfréner certains de ses désirs pour pouvoir vivre en société, dans la mesure où la trajectoire des désirs de chaque individu peut venir heurter celle d’un autre. Pour pouvoir vivre au sein d’une collectivité, il faut avant tout tolérer autrui, et donc renoncer à certains de ses désirs. D’après la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et du Citoyen, notre liberté s’arrête là où commence celle d’autrui : nous n’avons donc pas la totale liberté de satisfaire nos désirs s’ils viennent s’interposer dans la liberté d’un concitoyen. Nous pouvons ici établir un parallèle avec le principe d’inertie étudié en physique : dans un système isolé, tout corps subsiste dans un état de mouvement jusqu’à la rencontre d’un obstacle. Si un désir d’un individu donné rencontre des oppositions d’un autre individu, il ne pourra pas être accompli. D’autre part, d’après Hobbes dans Léviathan, les hommes à l’état de nature, désireux d’accomplir leurs désirs, se retrouvent dans des situations de guerre où aucune vie en société n’est possible, car la méfiance et la défiance règnent. Chercher à satisfaire tous ses désirs sans aucune limite engendrerait donc une vie en collectivité impossible et la peur que les manœuvres entreprises par autrui pour satisfaire leurs propres désirs ne viennent compromettre sa liberté. Ce renoncement à certains désirs individuel nécessaire pour notre vie en société est surtout intéressant dans une démocratie, puisqu’il faut accepter que les désirs collectifs, ou l’expression de la "volonté générale" selon Rousseau, priment sur ses propres désirs. Cependant, si certains désirs sont incompatibles avec la vie en société, il n’est pas non plus nécessaire pour la rendre possible de vaincre tous ses désirs.
Nous avons vu que nous devons lutter contre certains de nos désirs qui compromettraient notre respect des bienséances et d’autrui. Or d’après la théorie freudienne de l’inconscient psychique, nombre de nos désirs trop choquants ou immoraux seraient refoulés dans notre inconscient. N’y ayant pas accès directement, nous ne sommes pas conscients de l’existence de ces désirs, cependant il n’en reste pas moins qu’ils occupent toujours une part de nous, certes cachée, mais pas complètement fermée. En effet, ces désirs réapparaissent par le biais des rêves, des lapsus ou des actes manqués, d’une manière travestie. Notre action sur nos désirs serait donc totalement impossible, ou alors très difficile, par le biais de la psychanalyse. Dans le cas de cette hypothèse de l’inconscient psychique, lutter contre ses désirs conscients n’aurait donc pas de sens, car nous ne pourrions pas nous en défaire ; de plus la « capacité » de l’inconscient étant estimée bien supérieure à celle de la conscience, nos désirs refoulés contre lesquels nous n’avons aucune puissance nous détermineraient en permanence. Tenter de lutter contre nos désirs conscients (représentant seulement « la partie émergée de l’iceberg », c’est-à-dire la seule part que l’on voit, mais minime) serait donc vaine. Certains de nos désirs seraient donc en contradiction avec la morale ou avec l’intention de vivre en société, mais la question reste celle de l’efficacité de la lutte contre ses propres désirs.
II. Mais lutter contre nos désirs peut nous éloigner de notre essence
Et quand bien même parviendrions-nous à nous détacher de nos désirs, serions nous nous-mêmes ? Est-ce que les désirs ne seraient pas l’essence de l’homme ? Certains désirs peuvent en effet nous aider à nous connaître et nous comprendre, les désirs se trouvent parmi ce qu’on a de plus personnel, parmi ce qui nous différencie d’un autre. On remarque en effet qu’il est parfois très difficile d’avouer ses désirs par pudeur ou par crainte d’être incompris. Le désir est donc quelque chose qui nous constitue, et ne serait-ce pas nous dénaturer que de lutter contre ceux-ci ? Selon Spinoza, les désirs primeraient sur le jugement au sens où nous ne désirerions pas un objet parce que nous le jugerions bon, mais nous trouverions que celui-ci est bon, car nous le désirerions. C’est donc le désir qui précéderait et instaurerait la valeur d’un objet, on trouvera bon ce qui augmente notre puissance d’exister et mauvais ce qui la diminue. L’homme serait donc un être de désirs, car ceux-ci primeraient sur son entendement, cela vient renforcer l’idée que les désirs occupent une place importante et privilégiée dans notre être. Dans cette optique, une morale qui chercherait à supprimer le désir ressemble à une sorte de suicide ! Si vivre c’est désirer, cesser de désirer c’est en quelque sorte mourir. Combattre le désir ce serait aller à l’encontre de notre volonté d’être et lutter contre nos désirs en serait d’autant plus difficile.
De plus, le désir a l’effet bénéfique de nous pousser à l’action, il oriente tous nos moyens vers le but de sa satisfaction, il nous fait tendre vers un idéal. Même si l’on n’atteint pas les objets de tous nos désirs, nous gagnons certaines victoires ; même si un désir est irréalisable il nous entraîne à agir. Pour Spinoza le désir est à la fois une puissance de vie et un effort perpétuel pour persévérer dans son être : il s’agit du conatus. On peut ainsi agir pour accéder à un objet désiré et aussi conserver ce que l’on a, car le désir peut porter sur quelque chose que l’on possède déjà. Par exemple, le désir amoureux nous pousse à entreprendre toutes sortes de démarches pour conquérir la personne visée, et est toujours renouvelé lorsque celle-ci est séduite. Le désir augmenterait donc notre puissance d’agir et d’être satisfait. Ce sont nos désirs qui nous permettent d’avoir des idéaux, des utopies, et donc de donner le meilleur de nous-mêmes pour atteindre un objet visé, nos désirs contribuent à nous faire agir et donc à façonner notre propre vie. Ici, encore dans le domaine de la physique, on peut comparer le désir à une force qui nous mettrait en mouvement, ou à un moteur de nos actions. Lutter contre ce désir serait donc dangereux puisque cela nous ferait perdre un pouvoir d’action précieux. Il ne faudrait en aucun cas essayer de réduire le plus possible ses désirs, car cela nous entraînerait dans le statisme et nous ne pourrions plus entreprendre des projets aussi efficacement que poussés par nos désirs.
Cependant, vivre en suivant le cours de ses désirs n’est pas forcément la meilleure attitude à suivre, car ils peuvent représenter une « contrainte intérieure ». En effet, le désir peut nous faire attribuer des valeurs aux personnes ou aux objets qui ne sont pas objectives et ne proviennent pas de la raison : le désir peut entraîner le préjugé. Si le désir influence nos jugements et raisonnements, nous pouvons penser que nous ne sommes pas libres de nos choix. Nous n’avons pas réellement d’esprit critique ni de recul par rapport à l’objet à juger, car notre désir prend le pas sur notre capacité de juger ; cela remet en cause la question du libre arbitre. Un homme dominé par ses désirs et ses passions pourra-t-il délibérer en toute indépendance et sans contrainte ? Non, à partir du moment où on considère le désir comme un obstacle pour parvenir à l’objectivité, et dans cette mesure on peut considérer nos désirs comme des entraves à la liberté de pensée. On peut bien sûr citer l’exemple de l’amour qui rend aveugle (et parfois même sourd), mais aussi celui de l’homme avide de pouvoir qui aura un jugement particulier sur les personnes puissantes (admiration, jalousie…), différent de celui qu’il aurait eu sans prendre en compte tous ses désirs, donc sans cette envie de les égaler. Notre entendement étant faussé par nos désirs, pouvons-nous prétendre être libre ? Le désir nous pousse à l’action, mais est-ce qu’il nous mène à agir le mieux possible ? Si l’on veut affirmer agir librement, en dehors de toute contrainte, il faut donc travailler pour que son entendement ne soit plus dominé par ses désirs. Dans ce cas, il faudrait donc lutter contre ses désirs dans un but de liberté de pensée et d’objectivité face à un choix. Par exemple, un juge qui doit toujours être impartial devra faire cet effort de domination et de neutralisation de ses désirs lors d’un procès. L’homme est donc un être de désirs, ceux-ci peuvent lui être bénéfique dans ses actions et ses engagements, mais ils peuvent aussi constituer des obstacles difficiles à dominer.
III. Il faut distinguer les plaisirs afin d'atteindre le bonheur
Cependant, est-ce que l’action engendrée par les désirs ou la liberté qu’implique la lutte contre ses désirs mène au bonheur ? Sachant que le bonheur est un des buts principaux de l’homme dans la vie, on peut se demander quelle est l’attitude à suivre vis-à-vis de ses désirs pour y parvenir. La question est donc : le bonheur est-il dans la réalisation ou dans la suppression des désirs ? Cette interrogation que se posaient déjà les philosophes antiques attire des réponses totalement différentes selon les époques et les penseurs. Dans un premier temps, nous pouvons penser que la clé du bonheur est de réduire le plus possible ses désirs (donc de supprimer tous ses désirs qui ne sont pas vitaux) de manière à ce que tous ceux qui nous restent soient réalisables. En effet, les désirs sont illimités et tous ceux que l’on ne parvient pas à satisfaire entraînent donc le manque et la frustration ; si on laisse les désirs avoir trop d’emprise sur nous, on ne peut plus profiter de ce que l’on a et on vit dans le manque. Platon utilise la métaphore de deux tonneaux représentant l’homme et compare les désirs à des trous percés dans le fond. Le tonneau qui n’est pas percé est facile à remplir et ne nécessite plus aucun effort une fois qu’il est plein : c’est l’image de la plénitude. En revanche, même si l’on travaille en permanence pour remplir le second tonneau, il est impossible à combler : l’homme ne trouvera jamais la satisfaction. Il ne nous faut cependant pas supprimer tous nos désirs, mais trouver une certaine mesure, nous de devons pas suivre nos désirs excessifs, mais goûter aux plaisirs simples, naturels et donc accessibles selon Epicure. Trouver la juste mesure en toute chose est pour lui un ingrédient essentiel de la sagesse menant au bonheur. Devant chacun de nos désirs, nous devons nous poser cette question : quel avantage résultera-t-il pour moi si je le satisfais, et qu’arrivera-t-il si je ne le satisfais pas ? Ainsi il faudrait parfois aller à l’encontre de nos désirs pour nous garantir un bonheur durable ; lutter contre nos désirs superflus pourrait être la recette du bonheur.
Cependant, n’est-il pas humain de vouloir plus que le nécessaire , de rechercher les plus grands plaisirs et de saisir toutes les opportunités que nous offre la vie? À notre époque, la satisfaction de nos plaisirs est largement encouragée, notamment par la publicité ; et la philosophie d’Epicure peut nous paraître assez lointaine et démodée. On peut en effet se demander quels sont les plaisirs d’une vie totalement ordonnée, mesurée, calculée… Notre conception du bonheur peut reposer au contraire sur le fait de profiter de tous les plaisirs de la vie, vivre au jour le jour selon le thème du carpe diem et saisir toutes les opportunités de bonheur que l’on rencontre sans grande réflexion, sans classer ses désirs ni chercher à les tempérer. En effet, on serait à première vue tenté de répondre à la question « faut-il lutter contre ses désirs » par la négative, puisque l’accomplissement de ce que l’on souhaite voir se réaliser est ce qui nous rend heureux, et que le bonheur est un des buts sinon le but unique de notre vie. D’ailleurs, dans Gorgias de Platon, Calliclès s’oppose à la définition du bonheur du tonneau plein, car selon lui, une fois le tonneau rempli, l’homme n’a plus aucun plaisir et vit « comme une pierre ». Ce qui ferait l’intérêt de la vie serait de « verser le plus possible », c’est-à-dire de chercher à satisfaire le maximum de désirs. D’ailleurs, ne sommes nous pas fascinés par les films où les héros peuvent assouvir toutes leurs passions ? (amour, meurtres, pouvoir…). Cette vision peut paraître cynique, mais nous faisons souvent passer notre bonheur avant tout, y compris la morale. Dans ce cas lutter contre ses désirs constituerait la frustration d’anéantir certains désirs que l’on aurait pu réaliser, et serait un obstacle au bonheur.
Mais nous voyons que cette vision du bonheur est sans doute extrême, car la satisfaction de certains désirs peut nous être néfaste (un meurtre sera ensuivi d’une peine de prison par exemple), et la « chasse aux désirs » peut entraîner un sentiment de manque permanent. Il faudrait donc savoir accorder le plaisir et le fait d’être en lien avec la réalité de manière à ne pas poursuivre des désirs inaccessibles ou interdits (par la loi ou par la morale). Ainsi, selon Rousseau, le bonheur repose sur l’équilibre entre nos désirs et nos facultés, et si nous ne devons ni réduire au possible ce que l’on désire ni tenter d’augmenter nos capacités, il nous faut cependant lutter contre nos désirs irréalisables pour parvenir au bonheur. La fable Le philosophe scythe de La Fontaine est dans la même optique : un sage y cultive son jardin (représentant le bonheur) en « retranchant l’inutile » et en « ôtant le superflu », c’est-à-dire qu’il entretient ses désirs tout en luttant contre ses passions trop extrêmes. Or un homme désireux de l’imiter taille lui tous les arbres de son jardin, même les plus beaux, ce qui entraîne la mort de son verger. On comprend donc ici que la lutte contre la totalité de ses désirs n’est pas prescrite, mais qu’il faut cependant cultiver ses désirs avec modération de manière à connaître le plaisir tout en vivant sereinement et non pas tourmenté par un tumulte de passions. Mais comment être maître de ses désirs, comment réussir à supprimer les « mauvaises branches » ? Il faudrait réussir à faire primer sa volonté et donc sa raison sur ses désirs, et dans ce cas on pourrait se convaincre que certains de nos désirs ne sont pas bons. Encore faudrait-il réussir à analyser nos désirs et en exercer un jugement… Pour parvenir au bonheur il faudrait donc discerner quels désirs valent d’être poursuivis et lesquels ne peuvent nous entraîner que dans une route sans fin menant finalement à la frustration ; lors de la recherche du bonheur il serait donc bon de lutter contre seulement certains de nos désirs.
Conclusion
Nous avons vu que les désirs possédés par l’homme sont en partie ce qui le rend unique et ce qui le pousse à vivre comme il le fait. Nos désirs sont en effet des moteurs de nos actions, et leur contentement engendre du plaisir. Cependant, nous ne pourrions sûrement pas vivre en nous laissant porter par nos désirs, car cela irait parfois à l’encontre de la morale et compromettrait notre vie en société ainsi que notre liberté de juger. De plus, ce ne serait pas par la libération et la satisfaction d’un maximum de désirs que nous parviendrions au bonheur à cause de la frustration qu’entraînerait l’impossibilité de rendre réels nos désirs inassouvissables.
Il semble que la voie à suivre soit celle de la modération ; grâce à la réflexion sur soi-même et à la volonté, nous pourrions garder les désirs à notre portée, qui nous procureraient du bonheur, et vaincre ceux qui seraient inaccessibles ou superficiels et immoraux. Cette tâche de maîtrise de ses désirs est complexe et seulement les sages doivent y parvenir complètement, mais elle vaut la peine d’être essayée pour limiter nos frustrations, nos manques, et donc notre malheur. Le rôle du désir dans nos vies est cependant très important, le bonheur n’existerait certainement pas sans l’existence du désir, et il ne faudrait pas en réfréner une part trop conséquente… Pour vivre en harmonie, la voie à suivre ne serait-elle pas de savoir à la fois écouter certains désirs et en faire taire certains autres ?