On aurait tendance à croire que l’ordre du monde entrave nos désirs et ne nous permet pas de vivre. L’une des premières idées serait de vivre pleinement notre vie, d’exécuter nos désirs ainsi il vaudrait mieux changer l’ordre du monde. Et comme le désir, c’est ce qui nous définit alors si on change nos désirs, on nie ce qu’on est et donc changer ses désirs est impossible. Ne vaut-il pas mieux alors modifier l’ordre du monde ? Cependant comme le désir est insatiable, il est la cause d’une frustration qui finit par découler sur la souffrance ainsi dans notre intérêt à tous, il faudrait changer nos désirs et donc se conformer à l’ordre du monde. L’on rencontre là une véritable ambiguïté qui fait que l’on se demande s’il faut changer ses désirs ou l’ordre du monde ?
Le monde désigne le cosmos et tout ce qui est contraire au chaos tandis que l’ordre désigne ce qu’il est nécessaire de se conformer donc cela implique une hiérarchie. Alors l’ordre du monde désigne le principe d’organisation et la structure de l’espace ce qui sous-entend toutes les lois de la science qui permettent le fonctionnement de l’univers, du monde naturel dont l’homme doit s’y contraindre. Par ce mécanisme, le désir se restreint car il n’est plus aussi accessible au bonheur donc ce frein ne nous permet pas d’accéder au bonheur. Le mot faut-il montre l’obligation, la possibilité et l’intérêt à changer ses désirs ou l’ordre du monde. Cependant changer suggère qu’il y ait une modification qui peut aller jusqu’au renoncement. Ces deux derniers mots montrent notre attachement et notre hésitation à changer ses désirs ou l’ordre du monde. Peut-on d’abord envisager de changer l’ordre du monde ? Cela paraît impossible donc cela sous-entend que si ce n’est pas l’ordre du monde qu’on modifie alors peut-on modifier nos désirs ? C’est deux cas de figures peuvent être toutes les deux impossibles y a t-il un terrain d’entente ?
Tout d’abord, le désir c’est ce qui nous définit, nous affirme. C’est le motif de la plupart de nos actes. C’est le moteur de notre vie. Ainsi la quête du désir d’un objet montre notre volonté. Sans désir, on nie qui on est, on devient donc impuissant et on est insatisfait. Alors le désir nous permet la quête et la satisfaction de nos désirs. C’est grâce aux désirs qu’on vit. Le désir débouche forcément sur quelque chose qui est une forme de bien être, de bonheur. Le chemin pour arriver à aboutir à un désir peut paraître dur donc lorsqu’on arrive à accéder à ce désir et par suite à ce bonheur nous avons une satisfaction Rousseau le définit de la même manière dans son roman épistolaire La Nouvelle Héloïse. Pour lui, le bonheur se trouve dans le désir. L’objet nous porte vers la satisfaction et le désir. C’est la quête de cet objet qui nous permet d’accéder au bonheur. Ainsi, sans cette poursuite continuelle des désirs que nous reste-t-il ? Sans désir on ne peut pas vivre donc vivre c’est désirer, cesser de désirer c’est en quelque sorte une fin décisive la mort.
S’il existe une morale au désir, celle-ci ne doit pas oublier la nature profonde du désir sinon ce serait le nier et donc nier en quelque sorte qui nous sommes. Alors cette morale ne doit pas négliger le désir mais plutôt s’allier.
Si l’on s’est donné un objectif pour arriver à nos désirs, nous devons le suivre malgré toutes les ronces qui peuvent se trouver sur ce chemin. Ainsi malgré tous les obstacles que l’on peut rencontrer, comme les morales régies par la société, qui nous interdissent un désir, il faut adopter une attitude où il faut balayer tout ces « soucis » c’est à dire qu’il faut rejeter, braver les limites de ses morales pour accéder à nos désirs qui sont sans limites. La morale serait un moyen de tempérer ses désirs et les lois nous imposent une manière de vivre donc il faut les rejeter pour vivre pleinement sa vie. L’argent est l’un des meilleurs moyens qui nous permet d’accéder à nos désirs sans se préoccuper de la morale et de la justice. Mais dans ce désir n’y a t-il pas une forme de déchaînement et une violence illimitée ? L’on entend par-là que je n’écoute que mes propres désirs en rejetant tout le reste. Donc je nie les autres, je ne vois que mon propre intérêt. Qui est une forme d’avidité car nous ne cherchons qu’à profiter et à ne jamais rien donner. Cela provoquerait un monde où le désordre règne, l’on pourrait jusqu’à dire que l’on atteindrait le chaos. Cela serait opposé à tout ce qui est ordre donc en quelque sorte à l’ordre du monde. Finalement, l’on verrait là qu’il ne faut pas rejeter cet ordre qui permet le bien être et non le chaos.
La question faut-il changer l’ordre du monde revient en quelque sorte à se demander si l’on est l’auteur de l’ordre des choses ? Comment peut-on alors agir sur quelque chose que l’on a pas crée et qui a existé dès notre société par les valeurs, les morales, la société…cette idée rejoint celle des Stoïciens qui considéraient que l’ordre du monde ne dépend pas de nous mais ce qui dépend de nous c’est l’attitude face à l’ordre du monde celui-ci ne peut changer alors il vaut mieux se conformer à cet ordre. Ce qui implique changer ses avis, sa pensée plutôt que l’ordre du monde. L’on ne peut exercer son pouvoir que sur ce qui dépend des nous comme notre pensée. Cependant le désir est une pensée, je peux modifier mes habitudes autant que mes préjugés , je peux changer l’objet sur lequel porte le désir seulement si je ne désire que ce qui dépend de moi. Cependant ce qui ne dépend pas de moi, l’on ne peut jamais le posséder ceci implique les autres, le monde, les lois et coutumes de mon pays , à travers cette énumération l’on pourrait dire plus globalement que nous ne pouvons posséder l’ordre du monde donc nous ne pouvons le changer. L’idée serait que l’on peux adapter nos désirs à ce qui est possible et que nous ne pouvons pas changer la face de l’ordre du monde. Mais sur quels critères doit-je m’adapter pour sélectionner mes désirs ?
Pour Descartes, il était claire qu’il fallait changer ses désirs plutôt que l’ordre du monde, il l’exprime clairement dans le Discours de la méthode : « changer mes désirs plutôt que l’ordre du monde » donc il déclare qu’il faut accepter l’ordre du monde et être conforme nos désirs à cet ordre du monde que désirer l’impossible. Il faut connaître l’ordre du monde pour savoir ce qui fait l’objet de notre volonté et accéder au bonheur. Ce changement n’implique pas un renoncement total des désirs mais plutôt les régler en sélectionnant ce qui nous est possible à réaliser. Comme nos désirs sont sans cesse renouvelés et qu’ils deviennent de plus en plus exigeants et que les ressources qui nous entourent sont limitées, il vaut mieux régler ses désirs à l’ordre du monde, les changer ainsi nos désirs peuvent être alors plus facilement comblés si on sait lesquelles prendre.
De plus, les désirs ne cessent de nous hanter, notre âme est hantée par ces continuels désirs qui ne sont pas tous assouvis mais tentent de l’être. Le désir implique une recherche perpétuelle, cette perpétuité n’est-elle pas une forme de souffrance ? Donc chercher perpétuellement ses désirs n’est-il pas un supplice infernal ? Alors si l’on tente de satisfaire tous nos désirs l’on se condamne à une vie de souffrance. Pour remédier à cette importante quantité de désirs, il nous faudrait une vie réglée et satisfaisante, en quelque sorte un art de vivre. Cependant, on ne peut exclure tous nos désirs, notre vie serait vide alors. Le désir c’est ce qui nous permet de vivre. Il faudrait donc trouver un moyen de choisir ses désirs mais comment ? Selon Epicure, il faut avoir le sens de la mesure c’est à dire adopter l’attitude qui nous porte vers le bonheur. C’est par la connaissance de notre corps que l’on sélectionne nos plaisirs ainsi l’on choisit mieux les désirs pour accéder au bonheur. C’est à dire savoir quel chemin adopter lorsqu’on rencontre des désirs qui sont légitimes et naturelles et d’autres illégitimes pour arriver au bonheur. L’excès d’un désir provoque le dégoût, l’ennui, le mécontentement ainsi cette répétition de ce même désir ne nous entraîne pas vers les désirs légitimes. En effet, avoir une vie continuellement adaptée au plaisir conduit à une vie vide. Pour adopter une règle de conduite, on nous demande une classification précise qui distingue nos désirs. Epicure en a fait une où il distingue principalement les désirs naturels et nécessaires et les désirs vains. Devant chacun de nos désirs, il faut se demander dans quelle catégorie les mettre. Après nous savons ce que l’on peut exercer. Les désirs vains il faut les éradiquer, elles sont source de souffrance donc il faut les refouler. Les désirs naturels et nécessaires il faudra chercher comment les satisfaire au mieux, ces désirs nous permettent d’éviter tout ce qui est souffrance, douleur et ils sont faciles à satisfaire. Ce travail exige un juste équilibre dans nos désirs.
Cependant cette manière de vivre est difficile à maintenir, elle est complexe. Dans la vie, le désir se choisit avoir une complète plénitude de l’âme : L’ataraxie. Un désir qui engendre des conséquences dommageables doit être à tout prix éviter. Cependant on peut accepter quelques exceptions comme la douleur momentanée qui nous permet par la suite d’accéder à un plus grand bien. La vie heureuse ne se déroule pas par la maîtrise de soi.
De plus, cette maîtrise du désir implique que l’on renonce à la partie la plus importante du désir. Si l’on est humain on ne peut rester accès aux désirs uniquement nécessaires, vitales, on ne peut chercher à se limiter aux besoins et à se contenter des désirs naturels. Quel serait le plaisir que l’on peut avoir ?
En outre, la question faut-il changer à ses désirs revient aussi à se demander si l’on est auteur de nos désirs ? Cela est vrai car chacun a sa propre personnalité et comme le désir est ce qui définit une personne alors chacun est libre de choisir ses propres désirs, les désirs sont donc différents d’une personne à l’autre. Mais si l’on regarde l’origine du désir on trouve que le désir est un concept qui désigne l’imitation, il se porte là où un autre a déjà porté son désir. C’est ce que tente d’élucider René Girard dans La Violence ou le Sacré. Pour lui , le désir est mimétique, ce n’est qu’une pâle copie du désir d’un autre contrairement à la pensée qui caractérise notre personnalité. Donc nous ne sommes plus en quelque sorte l’auteur de ces désirs. Cependant ces désirs viennent bien de quelque part. On peut supposer que les auteurs de ces désirs sont rares. Est-il toujours possible de changer nos désirs si ceux là ne viennent pas de nous ?
Pour trouver un terrain d’entente aux désirs et à l’ordre du monde, il suffirait de changer en même temps le désir et l’ordre du monde. Mais à quels moyens ?
Après avoir vu que la volonté n’était pas le bon moyen de restreindre ses désirs, l’on ne verrait alors que la compréhension. Pour y arriver, il suffirait de faire tout un travail d’analyse sur ce désir afin de comprendre les causes, la manière dont il se représente, les conséquences sur l’homme. Ainsi, j’aurai tout un avis sur lui. C’est à ce moment là où je comprends ce qu’est ce désir que j’arrive à utiliser ma volonté pour me détacher du désir et le changer. Celui-ci a une influence beaucoup moins considérable sur moi. Ceci peut donc permettre un sentiment de maîtrise sur ses désirs car avant ils réussissaient à nous dépasser et à nous faire provoquer un sentiment de frustration. L’avantage que l’on pourrait tirer de là c’est que notre esprit a réussi par cette méthode à ne plus se faire dominer par le désir.
Pour ce qui est de l’ordre du monde, l’homme n’a aucun pouvoir sur les principes c’est à dire qu’il ne peut modifier les lois de la physique, de la nature en général on peut parler de l’ordre du monde naturel. Mais si l’homme ne peut le modifier, il peut néanmoins essayer de le comprendre ainsi il peut en quelque sorte exercer son pouvoir sur le monde humain en le faisant évoluer avec tout ce qui a été découvert sur la planète Terre. C’est par le désir que l’homme réussit à trouver la volonté de le faire évoluer donc l’on retrouve ici le désir de savoir. Par exemple, la découverte est l’un des moyens qui peut changer la mentalité sur l’ordre du monde. Donc par le désir de savoir, l’homme a été poussé cette découverte mais cela n’a pas changé l’ordre du monde mais a permis de mieux le comprendre.
Ainsi, nous ne pouvons pas véritablement trancher entre changer nos désirs ou l’ordre du monde. Ce dernier permet à l’homme de changer que sa vision envers lui et c’est par le désir de savoir que l’homme arrive à changer la vision du monde face au cours des choses. Donc nous ne pouvons dissocier, décider s’il faut changer l’ordre du monde ou nos désirs. Le seul moyen qui nous a été le clairement permis de changer nos désirs est la classification qui nous permet de distinguer nos différents désirs et de choisir ceux qui sont le plus conforme à notre vie, notre entourage et notre société. Mais cependant cet argument présente quelque lacune, ainsi ce n’est pas par la volonté de changer nos désirs que nous y arrivons mais c’est par l’analyse que nous pouvons le faire.