L'existence d'un inconscient fait-elle obstacle à la connaissance de soi ?

Le travail préparatoire, suivi de la réalisation intégrale du sujet.

Dernière mise à jour : 07/11/2021 • Proposé par: maxcasi (élève)

Analyse du sujet

Forme du sujet:
Le sujet interroge la relation entre l’existence de l’inconscient et la connaissance de soi. C’est-à-dire qu’il interroge la possibilité pour le sujet d’appréhender son psychisme considéré comme obscur ou partiel et de dépasser ces caractéristiques.

Relations qui font sens:
L’inconscient est l’irréfléchi, l’involontaire, le non-conscient, il y a donc une opposition avec la connaissance de soi qui suppose la conscience et la possibilité pour le sujet d’être transparent à lui-même.

Le mot décisif:
Le mot décisif est obstacle qui définit la relation entre l’inconscient et la connaissance de soi.

Analyse de notion:
L’existence – la réalité, le fait, la reconnaissance, l’état.
Inconscient – conscience moindre, non-conscient, structure du psychisme, activité productrice de représentations.
obstacle – entrave, empêchement, difficulté, impossibilité, frein.
Connaissance de soi – réflexion sur soi, introspection, création, responsabilité.

Le questionnement :
Pourquoi la nature partielle de notre conscience rend-elle difficile une réflexion sur soi ? L’inconscient est la compréhension d’un inaccessible au sein de la conscience et qui concerne l’ensemble de notre pensée. L’être humain a une connaissance partielle des procédés logiques présents à sa pensée, il est donc difficile d’envisager une connaissance de soi claire puisque la conscience est obscure à elle-même. Pour que le sujet puisse se connaître il doit avoir une idée claire et distincte de lui-même or la conscience semble par le biais de l’inconscient perdre ce potentiel éclairant pour le sujet. (les petites perceptions, Leibniz)

La théorie sur l’inconscient nous permet-elle de nous comprendre en tant qu’homme et donc en tant que sujet ? Freud par le biais de l’inconscient arrive à déterminer des structures du psychisme humain. Comprendre la nature de l’inconscient, en tant que réalité psychique c’est mieux saisir notre nature et le fonctionnement de notre pensée. L’inconscient permet donc d’aboutir à une connaissance de soi centrée sur une compréhension des schémas de pensée propres à chaque individu. Nous accédons ainsi à une connaissance qui est scientifique parce qu’à prétention universelle. Ainsi l’inconscient fait obstacle à la connaissance de soi, mais c’est un obstacle qui peut être surmonté par le biais de l’analyse et d’une réflexion sur soi qui reconnaît la part inconsciente du sujet.

L’inconscient n’est-il pas un frein à la libération du sujet par lui-même? L’inconscient représente un danger, celui pour le sujet de se disculper et de rejeter la responsabilité de ses actes par la compréhension d’une nature qui lui échappe toujours. L’inconscient est intégré au psychisme du sujet, il relève d’un déterminisme. De plus il est impossible de résoudre tous les conflits inhérents à notre nature et donc l’inconscient peut représenter un réel obstacle à la compréhension de soi tant il peut bouleverser la compréhension de soi pour un sujet. Il faut sauvegarder l’intégrité de l’individu, du « je » qui prend conscience de lui-même en acceptant de s’approprier ses choix, ses actes, et ses relations. L’individu doit rentrer en soi pour se connaître et c’est là où la psychanalyse le guide, mais la connaissance de soi est propre à la conscience selon la capacité pour le sujet à intégrer ses actions et ses choix dans son propre devenir. Selon ce point de vue, l’inconscient représente un risque puisqu’il peut rendre le sujet obscur à lui-même sans lui donner les clés pour redécouvrir son identité.

Problématique:
La conscience. Pourquoi l’inconscient modifie-t-il la conscience et donc le rapport à soi ?

Introduction

L’existence d’un inconscient est attestée par la présence de phénomènes dont l’origine échappe à la conscience. Les rêves, les actes manqués, les phobies sont autant de manifestations de processus dont nous constatons les effets sans en connaître la cause. Chacun se découvre obscur à lui-même. L’existence d’un inconscient fait-elle obstacle à la connaissance de soi ? L’inconscient peut se comprendre du point de vue de la conscience comme ce qui lui échappe, c’est aussi une réalité de notre psychisme analysée par Freud, et enfin il s’agit d’une interprétation de l’origine de nos processus mentaux ou de nos actions. Un obstacle est une gène, une difficulté, voire une impossibilité. La connaissance de soi peut-être comprise comme une compréhension éclairée de soi-même, une définition des structures de notre humanité, ou encore comme la capacité pour l’individu à se reconnaître dans ses choix, ses relations, ses actions. Cela suscite un questionnement : Comment peut-on accéder à une connaissance de soi si la conscience est ignorante d’elle-même ? Pourquoi la psychanalyse offre une compréhension de l’homme ? L’homme peut-il s’approprier son inconscient ? Pour répondre à ces questions nous poserons le problème suivant : pourquoi l’inconscient modifie-t-il la conscience et donc le rapport à soi ? Pour répondre à cette question nous étudierons dans un premier moment le non-conscient présent dans toute conscience et les implications que cela peut avoir pour la connaissance de soi. Puis nous analyserons la théorie de Freud pour savoir en quoi elle éclaire la nature humaine. Et enfin nous argumenterons en faveur d’une compréhension de la conscience comme liberté à laquelle l’inconscient peut faire obstacle et donc empêcher une découverte de soi pour le sujet.

I. Le non-conscient est présent dans toute conscience

Premièrement l’inconscient semble entre une caractéristique de notre rapport au monde. Pour qu’il y ait connaissance de soi il faut une conscience qui puisse être transparente à elle-même et éclairée, c’est-à-dire capable d’appréhender l’ensemble de nos processus mentaux. L’inconscient compris comme le non-conscient est présent dans notre manière de nous rapporter au monde, ainsi il serait difficile pour la conscience, comme recueil d’informations et réflexion du monde, d’embrasser les phénomènes dans leur totalité. La conscience est partielle et donc partiale, puisqu’il y a de l’inconscient et de l’irréfléchi et à partir de là nous ne pouvons avoir une connaissance totale. La connaissance de soi est donc logiquement impossible puisque notre conscience est parcourue de processus inconscients, entravant la bonne marche de la conscience.

Ainsi on peut penser à la compréhension de la conscience moindre proposée par Leibniz dans les nouveaux essais sur l’entendement humain, qui stipule l’existence d’un inconscient à l’intérieur du phénomène de la perception. Une perception est en fait associée à une myriade de petites perceptions, anodines, ténues, et dont nous n’avons pas conscience. Nous avons seulement conscience de la somme de ces perceptions et nous pouvons par exemple penser au bruit de la mer, qui est fait de l’association du bruit de toutes les vagues, dont les perceptions sont inconscientes et ne viennent à la pensée que parce qu’elles sont associées. En fait la conscience est constituée d’un grand nombre de perceptions dont la majorité sont inconscientes et donc nous ne pouvons pas totalement être sachant sur nous-mêmes puisque un grand nombre d’éléments échappent à la conscience.

La conscience est donc un phénomène qui contient de l’inconscient, compris comme non-conscient, et donc l’outil principal pour la connaissance de soi est lui-même fautif puisqu’il n’est pas en mesure de nous délivrer une connaissance claire et distincte de nous-mêmes. Les connaissances que nous avons de nous-mêmes ne sont que partielles et en même temps elles sont partiales. Nous sommes en prise directe avec nous-mêmes, nous ne sommes donc pas objectifs dans la façon dont nous nous comprenons. Il est possible de parler notamment du narcissisme propre à la compréhension de soi, à partir de l’intérêt que nous nous portons inconsciemment. La compréhension de soi est forcément subjective car nous ne pouvons pas nous détacher de notre psychisme pour l’étudier de manière scientifique, il y a toujours une pré-compréhension de soi-même qui rentre en jeu, en tant qu’individu déterminé par une histoire et qui cherche à entrer en harmonie avec lui-même. Ainsi il est difficile pour un sujet d’avoir une compréhension de soi aboutie parce que la conscience ne mobilise pas tous les éléments de notre psychisme de manière efficace et parce que nous sommes toujours déjà engagés un rapport à soi prédéterminé. Cependant il est possible de comprendre ce rapport comme un état originaire et lui-aussi déterminé par des processus inconscients.

II. La théorie de l'inconscient nous éclaire sur nos comportements

Freud détermine l’inconscient comme un processus psychique à l’origine de notre pensée. Il s’agit principalement de désirs refoulés et d’une compréhension du psychisme dans sa relation entre plusieurs instances. De la même façon il s’agit de reconstituer une histoire de notre psychisme selon des moments formateurs pour notre fonctionnement tant du point de vue individuel que collectif. De telle sorte que l’inconscient n’est plus un obstacle, mais un moteur de la compréhension de soi. En effet en comprenant les désirs et les pulsions qui régissent notre nature psychique nous accédons à une plus grande compréhension de nous-mêmes qui s’approche aussi d’une forme d’universalité parce qu’elle nous définit en tant qu’homme, ou femme. Avoir une connaissance de soi ne relève donc pas seulement d’une compréhension de soi individuelle, mais aussi d’une compréhension collective puisque nous sommes des sujets humains et la psychanalyse œuvre dans ce sens.

De cette façon en comprenant le complexe d’œdipe tel qu’il est présenté dans la psychanalyse on en vient à découvrir des aspects de soi qui restaient jusque là inexplorés. Freud à travers ce complexe permet une compréhension des relations familiales et le développement de la sexualité chez un individu. Ainsi il est possible de comprendre comme la relation entre la mère, le père, et l’enfant pousse ce dernier à déplacer son attirance vers sa mère vers les autres femmes dans le développement normal de sa sexualité. Les travaux de Freud apportent donc un éclaircissement et une connaissance de soi parce qu’ils poussent au questionnement du point de vue des grands enjeux du développement de notre psychisme. L’inconscient n’est pas seulement quelque chose qui nous échappe. C’est aussi un principe de développement de fonctionnement de la pensée sur lequel nous pouvons nous appuyer pour nous aider à nous découvrir nous-mêmes. En explorant les relations conflictuelles entre un individu et son environnement selon des désirs qui se trouvent refoulés et qui cherchent pourtant à s’exprimer via les voies de la conscience, Freud parvient à guérir des patients de traumatismes réels, mais qui n’ont pas de causes physiologiques et qui pour ce médecin sont d’une nature psychique.

En s’intéressant à des cas cliniques, Freud élabore une théorie de l’inconscient, mais il cherche aussi à en retranscrire l’histoire. Il est donc possible pour tout individu de se découvrir soi-même en élaborant pour lui-même cette histoire. L’inconscient n’est pas seulement un contenu psychique, il implique aussi des pratiques et des découvertes, et à partir de l’ensemble du travail de Freud nous pouvons avoir un nouvel éclairage sur ce qui relève d’une difficulté pour chaque être humain : la sexualité, la moralité, la société, l’interdit, la maladie, etc. On ne peut pas réduire le travail de Freud à une description de l’inconscient, il s’agit aussi d’une enquête sur l’être humain dans laquelle chacun peut se retrouver. Cependant, cette enquête présente des risques puisque l’inconscient est par définition inaccessible et inobservable.

III. La théorie de l'inconscient peut néanmoins faire obstacle à notre liberté

La connaissance de soi par le biais d’une quête de compréhension des processus inconscients qui régissent notre psychisme peut se faire sous la forme d’une introspection ou d’un dialogue avec autrui. Cependant, pour se connaître soi-même, ne vaut-il pas mieux faire l’expérience de soi dans le monde ? L’individu est en constant devenir et il se crée en même temps qu’il crée le monde. Expliquer l’ensemble de nos comportements par un inconscient qui nous travaille constamment ne revient-il pas à faire fausse route ? Nous n’en finissons pas d’évoluer et même si chacun de nous est déterminé par une histoire faite de traumatismes et de conflits, il reste que nous n’avons pas attendu Freud et sa découverte de l’inconscient pour arriver à une compréhension de soi. L’inconscient peut donc faire obstacle à la compréhension de soi s’il devient un moyen pour le sujet de justifier des actes qui pourtant doivent lui être attribués et dont il est responsable. Freud parle d’un déterminisme à l’œuvre dans notre psychisme, mais ce dernier ne représente pas une entrave pour une majorité d’individus. L’inconscient est autant présent chez l’homme sain que chez le malade, mais la théorie de Freud jette davantage d’ombre que de lumière sur la compréhension de soi.

En effet l’inconscient est lui aussi en évolution. Se pencher sur une compréhension de soi tournée vers des processus obscurs et inaccessibles peuvent jeter un grand trouble sur l’individu. Remettre en question son histoire personnelle, ses relations familiales, ses projets de vie, ses besoins primordiaux demande un véritable courage et une volonté de se confronter à des difficultés qui peuvent être insurmontables. Via l’inconscient nous pouvons faire de nous-mêmes un ennemi, nous fabriquons de l’incompréhension et de l’inaccessible, alors que les chagrins et les malheurs qui sont constitutifs de nos vies auraient pu finir par passer avec le temps. Ainsi donner trop d’importance à l’inconscient et chercher à obtenir une connaissance de soi trop profonde serait un obstacle à une véritable réalisation de soi, qui se fait davantage dans l’action que dans l’introspection. Nous pouvons ainsi comprendre la critique de l’inconscient faite par Alain dans les éléments de philosophie, dans la mesure où l’inconscient viendrait déresponsabiliser le sujet, en créant en lui un autre moi. De telle sorte que cet inconscient viendrait par la même lui couper l’herbe sous le pied dans la connaissance de soi. L’individu ainsi déresponsabilisé ne serait plus en mesure de trouver le chemin de sa rédemption, possédant une connaissance sur lui-même qui lui resterait étrangère et en décalage avec son quotidien. L’inconscient menace l’intégrité du « je » dont un sujet a grandement besoin pour affronter le monde. Cet inconscient pour Alain est seulement le corps, parcouru de peurs, d’instincts, et de désirs, que nous ne pouvons jamais complètement appréhender, mais qui ne se révèle être un ennemi que si nous lui accordons trop d’importance.

De la même manière, la connaissance de soi qui s’appuie sur l’inconscient vient en retard par rapport à soi. Même si elle peut se révéler bénéfique pour mieux appréhender ses conduites et ses comportements, pour un individu, il reste qu’elle présente un danger puisque nous ne pouvons pas constamment rester à l’écoute de nous-mêmes et que cette connaissance se révèle a posteriori. Il en va ainsi de la nature paradoxale de la connaissance de soi, et que l’inconscient ne parvient pas à résoudre. On parvient mieux à comprendre qui on est en comprenant son origine et son histoire, mais celle-ci continue de se faire chaque jour, et on ne peut pas constamment remettre en question ses comportements pour y trouver une justification qui arrive toujours trop tard, et qui peut se révéler aussi nuisible qu’utile.

Conclusion

Une connaissance de soi est difficile pour l’individu dans la mesure où l’inconscient est à l’œuvre dans nos processus conscients. Cependant il est possible de comprendre l’inconscient non pas seulement comme un fait, mais aussi comme un outil visant à nous aider à nous comprendre nous-mêmes. Toutefois cet outil peut se révéler destructeur si nous lui accordons trop d’importance et si nous transformons des problèmes naturels en crise intérieure. De cette façon c’est par le biais de la conscience que nous pouvons répondre au problème, en la voyant comme partielle, partiale, mais avec un potentiel universel et originel pour le sujet, et qui doit donc préserver son intégrité.