Eugène de Rastignac, issu d’une vieille famille aristocratique désormais appauvrie, incarne la figure du jeune ambitieux décidé à faire carrière et fortune à Paris. A un bal organisé par sa cousine, Mme de Beauséant, il est présenté à la séduisante Mme de Restaud, qui n’est autre que la fille ingrate de l’infortuné père Goriot, voisin de pension d’Eugène.
Le lendemain du bal, Eugène rend à la belle comtesse une visite de politesse, plein d’espoir amoureux et ambitieux. Seulement, l’amant en titre, Maxime de Trailles, est déjà là. L’extrait montre Eugène en " terzo incomodo " (Stendhal, La Chartreuse de Parme) entre les deux amants, mais dévoile aussi la nature de la rivalité qui va s’installer entre les deux hommes. Enfin, cette scène permet à Eugène de révéler son caractère héroïque
I. Une scène de terzo incomodo: tiers présent qui incommode
A. Le terzo incomodo
C’est bien le rôle tenu par Eugène ici: il est pour Maxime un " intrus ", un " petit drôle " qu’il faut faire " décamper " ou " mettre (...) à la porte ". Le verbe " gêner " revient deux fois. Eugène s’est introduit sans le savoir entre une femme et son amant.
b. Une scène de violence sociale
Le vernis social, la comédie humaine, empêche de congédier Eugène. Il s’agit alors de lui faire comprendre qu’il gène sans passer par le discours direct. Dès lors, les personnages utilisent comme moyen de communication le regard: " Maxime regardait (...) d’une manière assez significative pour faire décamper l’intrus ". La traduction de ce regard par le narrateur est violente, il faut " mettre à la porte ", ce qui est particulièrement dévalorisant, humiliant socialement pour Eugène, qui ne maîtrise pas ce code des regards. La comtesse, confrontée à cette incompréhension, a recours à un geste grossier. D’une part, elle n’attend pas " la réponse d’Eugène ", et d’autre part, elle " se sauv(e) comme à tire d’aile ", le verbe et son complément soulignant l’idée de fuite et d’extrême rapidité.
c. Une scène comique
Eugène apparaît au début du texte comme une sorte de Candide. Il n’est pas au courant des usages du monde, ne comprend pas la situation alors que le narrateur fait remarquer que le " visage " de la comtesse " dit tous (ses) secrets sans qu’elle s’en doute "