Le problème du sens et de la valeur d’une existence vouée à la mort préoccupe la philosophie depuis son origine. Elle est même apparue comme le questionnement essentiellement philosophique ; ses enjeux semblent en effet cruciaux, engageant la possibilité de toute vie bonne et heureuse. La conscience de la mort, qui caractérise la dimension humaine de l’existence, risque en effet de faire tomber celle-ci dans l’absurde. Il y va donc de la possibilité de donner du sens à cette existence toute entière. Nous ferons naître notre questionnement à partir de l’affirmation suivante : « l’homme vit sans cesse sous la menace et dans la crainte d’une mort imminente ». C’est parce qu’il a conscience de son être que l’homme est également conscient du non-être. Ce non-être effraie, en tant que tel, il est le rien, le vide, le néant…Affirmer que l’homme vit sans cesse sous la menace et dans la crainte d’une mort imminente n’est pas faux. En effet, ayant conscience de notre vulnérabilité, nous savons qu’elle plane au-dessus de nous. Cependant, cette affirmation n’est pas sans poser quelques problèmes. La peur de la mort n’est pas tout dans la vie de l’homme. Il la craint, cela est certain ; il vit sans cesse sous sa menace, cela ne l’est pas moins en effet puisque telle est la destinée de chacun d’entre nous. Néanmoins, nous ne pensons pas à notre mort prochaine dans chacune de nos actions, dans chacun de nos actes, tout du moins pas consciemment. Cette affirmation nous conduit donc naturellement à nous interroger sur l’effectivité de cette crainte permanente de la mort. Seul un questionnement existentiel, envisagé depuis le point de vue engagé et partial du sujet peut nous faire comprendre le tourment, la crainte qu’impose l’idée de la mort.
I. La mort, une peur réelle
La mort, phénomène banal est aussi commune que la natalité. Et pourtant, comme l’affirme Jankélévitch (La Mort) : « Jamais la répétition du phénomène empirique n’effacera le drame des consciences individuelles ». Pourquoi ? La mort appartient à la fois au domaine de l’expérience et, en un sens, le transcende comme un miracle. Elle est le miracle de la disparition absolue, quelque chose de démesurée et d’incommensurable. Comment comprendre ce paradoxe : ce qui est la loi même de la vie, et sa loi la plus certaine, est en même temps extra ordinem, irréductible à tous les autres phénomènes naturels. C’est ce que Jankélévitch nomme « l’empirico-métempirique » de la mort : le fait q