Texte faisant parti des Destinées, publiées en 1864 après la mort de l’auteur. De Vigny a écrit ce texte à la suite d’une série de difficultés dans sa vie. Alfred de Vigny est choqué par son époque, sa mère est morte et il s’est séparé de sa femme.
I. La dimension philosophique
Le mouvement du stoïcisme est apparu avec Zénon. Sa morale est fondée sur la souffrance. « Stoa » en grec signifie le portique. Les philosophes du stoïcisme, aussi appelés les philosophes du portique, considèrent qu’il faut supporter sa destinée comme les colonnes supportent le toit.
La clé du texte se trouve au vers 83, avec « stoïque fierté ». Stoïque qualifie soit les adeptes du stoïcisme, soit les personnes ayant le même comportement, mais n’étant pas des adeptes. La devise du stoïcisme est « Supporte et abstiens-toi ». Le texte présent une correspondance de structure avec la phrase : « Souffre et meurt sans crier ».
Cela souligne l’importance qu’Alfred de Vigny donne à la vie et à la mort. En effet, les stoïciens étaient adeptes du suicide, préparé, calculé et froid. Alfred de Vigny n’adhère pourtant pas à cet aspect. « Souffre » est une référence à sa propre mort. Il donne une réflexion sur l’existence que l’on quitte sans regret. Il donne une nouvelle devise, qui est basée plus sur la mort que sur la vie.
II. Le symbolisme du texte
La louve romaine est citée vers 38. C’est un mythe : la louve romaine a allaité Romulus et Remus, les fondateurs de Rome. Il y a une analogie entre cette louve qui donne le lait aux deux enfants et le loup qui donne sa philosophie à l’auteur. Tout ceci justifie la partie III par rapport aux deux précédentes, et le discours du regard du loup. Alfred de Vigny renverse le mythe du loup cruel : le loup prédateur devient en effet le loup donateur.
Les majuscules dans la troisième partie, du vers 73 à 87. « Homme » représente l’idéal humain, la vision stoïcienne de l’homme pur « débile » vient remettre les choses en place et traduit le pessimisme d’Alfred de Vigny sur la condition humaine. « Sort » est une allégorie, une personnification du destin ou des destinées (le titre de l’œuvre). C’est la lutte de l’homme contre sa destinée. On observe le loup face au chasseur et l’homme face à son destin.
Le loup ne parle pas directement, l’auteur se fait son interprète. Il y a plus de réalisme car le loup ne fait pas de surnaturel. Ceci s’oppose aux autres auteurs (La Fontaine donne la parole aux animaux dans Le Loup et le Chien , ou Anouilh qui fait parler le loup face à ses petits, dans Le Loup, La Louve et les Louveteaux). Le loup sert ici de prétexte à une réflexion sur la mort, une morale philosophique.
Les quatre derniers vers ne s’adressent à personne et reprennent la devise générale, ils mettent en valeurs le stoïcisme. « gémir, pleurer, prier, sont également lâche » L’accord souligne une règle antique (« sont » ne devrait pas s’accorder au pluriel mais avec le dernier verbe), ce qui est une référence à l’origine du mouvement stoïque (dimension historique du texte)
Alfred de Vigny et Anouilh pensent tous deux que le chasseur ne sort pas vainqueur. Pourtant, ils ont des points de vue différents sur le thème de la chasse. Pour Alfred de Vigny, il s’agit de parler de la mort et non de la chasse (le titre en est un parfait exemple : la mort du loup, et non pas la chasse au loup), la destinée du loup est la destinée potentielle du chasseur. Pour Anouilh, la chasse est un prétexte à la réflexion sur la cruauté.
Les passages sont disproportionnés. Le 1er paragraphe est très long, il donne un côté épique au loup qui est grandi et magnifique. Les paragraphes 2 et 3 constituent un retour à la réalité, c’est-à-dire à la petitesse de l’Homme.
Conclusion
Ce texte n’est pas un hymne à la chasse, c’est une illustration de l’épopée du loup. Alfred de Vigny conditionne le lecteur pour qu’il admette sa philosophie. On peut considérer ce texte comme une sorte de fable : l’animal est utilisé au profit de l’auteur.