Le Malade imaginaire, dernière œuvre dramatique écrite par Molière, est une comédie-ballet en trois actes et en prose, créée le 10 février 1673 par la Troupe du Roi sur la scène du Palais-Royal à Paris. La pièce tourne autour d'Argan, le « malade imaginaire », homme veuf qui se voit prodiguer des « soins », par des médecins peu scrupuleux.
Dans cette scène, M. Diafoirus, médecin, présente officiellement son fils Thomas à Argan, qui souhaite le marier à sa fille. Le père, dans une longue tirade, fait de son fils un éloge pour le moins curieux.
Problématique : En quoi cet éloge atypique est-il une satire efficace de la médecine et des médecins ?
I. Un enfant discret (l. 1 à 8)
La tirade du médecin s'ouvre sur une précaution oratoire, avec l'assertion suivante : « Monsieur, ce n'est pas parce que je suis son père, mais je puis dire que j'ai sujet d'être content de lui ». L'emploi d’emblée d'une tournure emphatique et négative nie le lien entre sa paternité (explicitée par la conjonction de subordination « parce que ») et l'à priori favorable qui pourrait orienter son discours en la faveur du jeune homme.
La conjonction de coordination « mais » qui oppose un jugement qui se veut objectif envers ce jeune homme qui inspire le contentement et mérite d'être loué pour ce qu'il est… mais les nombreuses marques de la première personne du singulier (« je », « j' ») et le lexique modalisé (« puis dire », « content ») font de cette tirade de Diafoirus père une entrée en matière assez ambiguë, où il semble presque se louer lui-même.
Les négations employées par M. Diafoirus sont éloquentes et permettent de lire à travers le portrait qu'il fait de son fils : « il n'a jamais eu l'imagination bien vive, ni ce feu d'esprit qu’on remarque dans quelques-uns ». L'absurdité du raisonnement du médecin est soulignée par la conjonction « mais ». L’affirmation qui suit dévalorise tout médecin, à l’insu semble-t-il du locuteur. Le portrait de Thomas enfant « lorsqu’il était petit » se poursuit avec nombreuses tournures négatives « jamais été mièvre (…) et éveillé » c'est-à-dire dépourvu des signes d’une intelligence vive.
Si les mots se font plus élogieux sur son tempérament « doux, paisible », ils sont suivis dans l’énumération du terme péjoratif « taciturne » puis à nouveau de tournures négatives, avec la répétition « ne jamais », qui souligne le caractère