I. La comédie dans la comédie
Toinette joue la comédie de la médecine pour désabuser Argan.
a) Le costume
Le costume suffit pour être pris pour un médecin; l’apparence suffit donc. Cette apparition de Toinette en médecin renforce par ailleurs l’illusion du théâtre dans le théâtre. De même (l.3) le dialogue « cela est admirable » confirme l'illusion par la crédulité d’Argan.
Toinette dit (l.9)« je vois monsieur, que vous me regardez fixement », ce qui introduit la justification de Toinette sur son âge. On a ici un renforcement de l’illusion théâtrale, en même temps qu'une éloge de la médecine, car elle éviterait le vieillissement, mais c’est bien sûr ironique dans la bouche de Toinette.
Le rire exagéré de Toinette a une valeur hyperbolique. Son âge serait très avancé pour l’époque.
(l.17)« un beau jeune vieillard »: cet oxymore renforce l’illusion théâtrale.
b) Le langage
Toinette imite le galimatias de la médecine de l’époque, une langage alambiqué et ridicule et un langage destiné à impressionner les malades par le soi-disant savoir et le peur (l.40) « Ce pouls là fait l’impertinent », (l.89) « épaissir votre sang qui est trop subtil », (l.92) « pour coller et conglutiner ». On est dans une parodie du langage des médecins (l.90) « bon gros bœuf, bon gros porc, de bon fromage de Hollande ». Les médecins aiment les énumérations etToinette énumère de la nourriture au lieu de remèdes. L'utilisation du latin de cuisine (l.88) « Ignorantus, ignoranta, ignorantum ! » est destiné à impressionner. Le langage affecté, complètement artificiel (l.44) « ce médecin là n’est point écrit sur mes tablettes des grands médecins » dénigre M. Purgon
Toinette flatte ici la manie d’Argan. Au contraire de la scène2, acte 1, Toinette abonde dans le sens d'Argan (l.5) « illustre malade comme vous êtes »: elle fait son éloge, hyperbolique mais ironique. Cela sert à désarmer son esprit critique. Elle use de la flatterie : (l.93) « je vais vous en envoyer un de ma main », flatterie qui vise ici son hypocondrie. (l.96) « Vous m’obligerez beaucoup »: elle va au devant des désirs d’Argan.
Béralde va dans le sens de Toinette: (l.119) « Voilà un médecin qui paraît fort habile », (l.121) « Tous les grands médecins sont comme cela » pour au final détourner Argan de la médecine
c) La comédie atteint son but
(l.111) « Cela n’est pas pressé »: pour la première fois, Argan est réticent a une prescription médicale. (l.120) « il va un peu bien vite » est un oxymore qui traduit le désarroi d'Argan devant les prescriptions du médecin, comme s’il n’était plus aussi malade.
Les phrases nominales expriment le désarroi d’Argan devant le charlatanisme (l.122) « me couper un bras, me crever un œil ». (l.123) « J’aime bien mieux qu’il ne se porte pas si bien »: Argan reconnaît que les remèdes peuvent être pire que les maux.
Conclusion : Cette comédie caricaturale de la médecines réussit à détourner Argan des médecins alors que les railleries de Toinette et le bon sens de Béralde n’avaient pu y parvenir.
II. La satire de la médecine
a) La prétention
Les termes hyperboliques (l.5) « illustre », (l.23) « grands et beaux », (l.22)« dignes » sont la marque de la prétention. Ils sont ridicules et masquent la volonté d’impressionner le patient. L'utilisation d’un langage médical cache le mépris des maladies et des maux ordinaires : « bagatelle », « fatras », « fiévrotte »: les malades servent seulement à mettre en valeur une maladie et le médecin.
Les oxymores comiques comme « bonnes pestes » indiquent le cynisme des médecins. « Je voudrais que vous eussiez toutes les maladies que je viens de dire, que vous fussiez abandonné de tous les médecins »: la gradation et le vœu sont paradoxales pour un médecin. « c’est là que je me plais, c’est là que je triomphe » le but est uniquement personnel: la gloire du médecin et non guérison du malade. Il se vante de connaître de grands médecins. Il traite ses confrères d’ignorants, et ceci est renforcé par le comique de répétition; il y a une concurrence entre eux.
b) Le charlatanisme
« Il dit que c’est du foie et d’autres de la rate »: dénonce l’incompétence des médecins.
Toinette est en désaccord avec M. Purgon sur le régime alimentaire. Consultation caricaturale et la répétition de « le poumon » invalide les précédents diagnostics. Argan a des maux sans gravité que Toinette présente comme des symptômes, et ment sur l'effet de ses soins: « Vous voyez un des effets secrets de mon art », « Je vous ferai bien aller comme vous devez »
c) L'absurdité
« battre comme il faut », « crever un œil, couper un bras »: la prescription est extrême. « ne voyez vous pas »: le diagnostic est absurde. Dénoncé par le comique de répétition, après avoir voulu lui couper un bras, elle veut lui crever un œil.
Le raisonnement est lui-même absurde « voir ce qu’il aurait fallu faire pour le guérir »
Conclusion : cette scène totalement burlesque caricature une consultation médicale afin de dénoncer la prétention et le charlatanisme des médecins.
Conclusion
Cette comédie dans la comédie est à la fois un éloge du théâtre qui parvient, par le biais de l’illusion à révéler la vérité et une satire de la médecine
Il y a dans la pièce plusieurs scènes de comédie dans la comédie :
-Acte I, scène I : Toinette pour éviter une dispute
-Louise qui fait la morte
-Argan qui fait le mort
Molière veut prouver par ce biais la portée de la comédie.