Dans ce passage, extrait du chapitre X de La Bête humaine, roman naturaliste d'Emile Zola, écrit en 1890, le narrateur évoque "l'agonie" et la "mort" de la Lison, une locomotive à l'égard de laquelle le héros, Jacques Lantier éprouve les sentiments d'un homme envers une femme. Dans les lignes précédentes, le narrateur vient d'évoquer la terrible vengeance de Flore, une femme amoureuse de Lantier qui la rejette, de peur de la sacrifier à ses tendances criminelles. Désespéré par l'attitude de Lantier, Flore veut se venger de sa rivale, Séverine, qui se trouve à bord de la Lison en faisant dérailler le train. Elle y parvient en immobilisant une charrette au milieu de la voie. Prise de remords et constatant l'inutilité de son geste puisque Séverine a réchappé de l'accident, Flore se donnera la mort en se jetant sous un train. Le déraillement de la Lison vient juste de se produire.
Comment le narrateur parvient-il à émouvoir le lecteur et à frapper son imagination ? Nous montrerons par quels procédés stylistiques le narrateur fait oublier que la Lison n'est qu'une machine, nous montrerons ensuite comment il parvient à créer le pathétique, nous explorerons enfin la dimension épique et fantastique du récit.
I. La Lison, présentée autrement que comme une machine
Précisez le "point de vue narratif" : la scène est vue à travers le regard de Lantier (focalisation, point de vue interne). Le narrateur évoque ses pensées, ses souvenirs, ses sentiments et ses émotions ; il s'agit d'un "monologue intérieur". Lantier éprouve vis-à-vis de la Lison les sentiments d'un homme à l'égard d'une femme dont il assiste à l'agonie. Sa pensée effectue un va-et-vient entre le présent (la déchéance, l'agonie et la mort de la Lison) et le passé (le souvenir de la Lison dans toute sa gloire, puis moins "alerte").
Montrez que le narrateur identifie la Lison à un être vivant, à un animal, à une femme et même à un enfant si bien que le lecteur en oublie que la Lison n'est qu'une machine (pensez au titre du roman La Bête humaine). Cherchez les images, les figures de style (comparaisons, métaphores, métaphores filées, champs lexicaux...) qui assimilent la Lison à un être vivant, qui la personnifient et l'animalisent. Le désordre des images - on peut parler de "vision hallucinatoire" - suggère le désordre aggravé par le choc de l'accident qui règne dans l'esprit de Lantier et évoque le chaos de la scène.
II. Une dimension pathétique
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