Jules Romains est un auteur du 20e siècle. Il a publié des poèmes et des romans mais c'est au théâtre qu'il va remporter un de ses plus grands succès « Knock ou le triomphe de la médecine ». Cette pièce sera mise en scène et jouée par un grand comédien, Louis Jouvet, en 1923. Après un exil aux États-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale, Jules Romains est élu à l'Académie française en 1946. Knock ou le triomphe de la médecine est sa pièce de théâtre la plus connue.
Jules Romains a conçu une doctrine littéraire l'unanimisme, selon laquelle l'individu ne peut être peint que dans les rapports sociaux, dans la vie collective. La pièce Knock en est une illustration. Le docteur a rempli sa salle d’attente en annonçant des consultations gratuites. Dans la scène 4 de l’acte 2, le docteur Knock, cupide et manipulateur, reçoit la dame en noir, avare, naïve qui se plaint d’être juste fatiguée
Problématique
L’analyse des caractères des 2 personnages, le déroulement de la consultation, les procédés comiques utilisés par Jules Romains vont permettre de montrer en quoi cette scène est une parodie de consultation médicale.
Plan de l’extrait
Tout d'abord Knock pose des questions pour évaluer la richesse de sa patiente (jusqu’à « j’ai plutôt de la fatigue »)
Ensuite il pratique un examen au cours duquel il profite de la naïveté de la dame en noir pour créer une maladie: les conséquences d'une soi-disant chute d'échelle il y a 40 ans (jusqu’à « J’ai envie »)
Puis après quelques précisions sur le mal, ils évoquent le coût élevé des soins nécessaires tout en créant la peur de la maladie chez sa patiente (jusqu’à « oui c’est ça »)
Il termine par une ordonnance dont le contenu rendrait malade toute personne bien portante.
I. L’étude des caractères : l’emprise de Knock sur la dame en noir
a) Un médecin qui profite de la faiblesse de la dame en noir
Knock reçoit une patiente qui se dit fatiguée et il va la convaincre qu'elle est gravement malade et qu'elle va devoir subir, pour guérir, des soins coûteux. Les didascalies accentuent l’examen grotesque de la malade (il lui palpe et lui percute le dos). Knock comprend que la peur qu'il créé, chez cette patiente avare mais riche, va lui permettre de prendre des honoraires élevés.
b) Une patiente rapidement sous emprise
La dame en noir est rapidement convaincue par le diagnostic: elle est tombée d'une échelle il y a 40 ans, pourtant ceci est impossible à diagnostiquer lors d'une auscultation : « j'ai eu bien du malheur de tomber de cette échelle ». La femme, naïve, abusée par le ton sérieux (et très affirmatif) et le vocabulaire ésotérique du médecin « faisceau de Türck-colonne de Clarke », prend peur « Mon Dieu, Mon Dieu ». La manipulation du médecin a réussi, la patiente est sous son emprise et la prescription contribue à accentuer sa peur : elle doit rentrer en voiture, se renfermer dans l’obscurité et suivre un régime qui ne peut que l’affaiblir.
II. Les procédés comiques
On peut distinguer plusieurs sortes de comiques.
a) Comique de mots
Un comique de mots à travers certaines répliques comme : « c’est la fesse gauche heureusement qui a porté » « vous avez envie de guérir ou vous n'avez pas envie », « Remarquez que vous ne mourrez pas du jour au lendemain. Vous pouvez attendre ».
b) Comique de geste
Un comique de gestes : le médecin fait tirer la langue à sa patiente et selon les indications des didascalies « il lui palpe et lui percute le dos, lui presse brusquement les reins » « il s’essuie les doigts »
c) Comique de situation
Un comique de situation afin de déterminer le coût des soins il demande le prix d'un veau ou d'un cochon ce qui ne fait pas très professionnel. L’aggravation rapide de l’état de la prétendue malade au cours de la visite chez le médecin est aussi source de comique : elle est arrivée juste fatiguée, elle ressort sans pouvoir marcher.
c) Comique de caractère
Un comique de caractère : la patiente est d'une grande naïveté et n’est pas étonnée par les affirmations invérifiables du docteur. Le docteur Knock est un grand manipulateur, intéressé par l’argent. Son comportement est à la fois drôle et inquiétant, peu digne d’un médecin.
Conclusion
Un médecin sérieux et compétent ne pratiquerait pas ainsi. Il crée la maladie pour pouvoir la soigner. L’auscultation et le diagnostic sont complètement farfelus, le traitement préconisé aussi d’ailleurs. Il s’agit bien d’une parodie de consultation médicale rendu possible par la naïveté de la dame en noir et le caractère malhonnête et manipulateur de Knock.