La question de la nature humaine est au cœur de la réflexion philosophique depuis des siècles. L’un des débats les plus importants porte sur la question de savoir si l'homme, dans son état naturel, est intrinsèquement bon ou mauvais. Cette interrogation touche à des aspects fondamentaux de la philosophie morale, politique et même psychologique.
Selon certains penseurs, l'homme serait naturellement bon, mais c’est la société qui le corromprait, tandis que d’autres affirment que l'homme est naturellement mauvais, égoïste et violent, et que c’est la civilisation qui lui permet de vivre en société. En réalité, cette question renvoie à des conceptions différentes de la nature humaine et de ce que l’on entend par « bon » et « mauvais ». Ainsi, nous nous demanderons si l'homme est, par nature, bon ou mauvais, en explorant ces deux visions opposées avant d’envisager une position plus nuancée.
I. L'homme naturellement bon : la vision de Rousseau
a) L’état de nature et la bonté naturelle de l'homme
Jean-Jacques Rousseau, dans son ouvrage Du Contrat social, soutient que l'homme est naturellement bon. Selon lui, à l’état de nature, l'homme est guidé par des instincts naturels tels que la pitié et la compassion. Il vit en harmonie avec la nature, sans être corrompu par la société.
L'homme naturel, selon Rousseau, est un être solitaire, sans propriété et sans lutte pour la survie, car il est peu envieux et n’a pas encore développé de vices. Il est donc « bon » par nature, et la société, en introduisant des rapports d’inégalité, est responsable de la corruption de l'homme.
b) La société comme source de corruption
Rousseau va encore plus loin en affirmant que c’est l’organisation sociale qui transforme l'homme en un être égoïste, avide et violent.
Le développement de la propriété privée, des inégalités sociales et des institutions qui régulent les rapports humains sont, selon lui, les facteurs qui dégradent la bonté naturelle de l'homme. La civilisation, loin de l’élever, l’a corrompu en lui imposant des valeurs artificielles.
II. L'homme naturellement mauvais : la vision de Hobbes
a) La vision du Léviathan : l'homme en guerre de tous contre tous
À l’opposé de Rousseau, Thomas Hobbes, dans son œuvre Le Léviathan, défend une vision beaucoup plus sombre de la nature humaine. Selon lui, l'homme, à l’état de nature, est naturellement mauvais, dominé par ses désirs égoïstes et sa volonté de puissance.
Dans un état de nature, il n’y a pas de morale, et les individus sont constamment en compétition les uns avec les autres pour satisfaire leurs besoins. Hobbes parle d’un « état de guerre de tous contre tous », où chacun agit en fonction de son intérêt personnel, ce qui entraîne violence et conflits incessants.
b) La nécessité de l'État pour limiter la violence
Pour Hobbes, c’est la création de l’État et de ses institutions, par le biais d’un « contrat social », qui permet de sortir de cet état de guerre.
L’État impose des règles et des lois qui contraignent les individus à renoncer à une partie de leur liberté naturelle en échange de la paix et de la sécurité. Ce n’est donc que sous l’autorité d’une puissance supérieure que l'homme peut échapper à sa propre nature violente et égoïste.
III. Une conception nuancée : l'homme comme être libre et responsable
a) L'homme ni bon, ni mauvais : l'influence de l'éducation et de la culture
Une troisième position, plus nuancée, est celle qui considère que l'homme n’est ni intrinsèquement bon ni intrinsèquement mauvais, mais qu’il est le produit de son environnement, de son éducation et de sa culture. Des philosophes, comme Kant, Hegel ou même les existentialistes modernes, comme Sartre, soulignent que l'homme est un être libre, capable de choisir ses actions et de se définir moralement.
Si l'homme n’est pas naturellement bon ou mauvais, il possède néanmoins la capacité de s’élever moralement ou de se dégrader selon les choix qu’il fait dans un contexte social donné.
b) La liberté de choix et la responsabilité morale
L’idée selon laquelle l'homme est libre et responsable de ses choix trouve sa place ici. L'homme n’est pas soumis à une nature déterminée, mais il a la capacité de se transcender par des actions éclairées. Sa nature n’est pas figée, mais dépend de sa propre volonté et de ses engagements personnels.
Ainsi, l'homme peut, à travers l'éducation, l’empathie et la réflexion morale, se définir comme « bon » ou « mauvais », selon les valeurs et les principes qu’il adopte.
Conclusion
En définitive, la question de savoir si l'homme est naturellement bon ou mauvais ne trouve pas de réponse simple. Si des philosophes comme Rousseau ont défendu l’idée que l'homme, à l’état de nature, est intrinsèquement bon, d’autres, comme Hobbes, affirment que l'homme est naturellement égoïste et violent.
Une position plus modérée, qui considère l'homme comme un être capable de choix et de transformation morale, semble plus juste. L'homme n’est ni entièrement bon ni entièrement mauvais, mais il est un être en devenir, façonné par son environnement, ses choix et ses actions. Ainsi, la question de sa bonté ou de sa méchanceté dépend de la manière dont il exerce sa liberté et assume ses responsabilités morales dans une société donnée.