Rabelais, en tant que médecin, ecclésiastique et romancier faisait partie du mouvement humaniste du XVIe siècle. Ce mouvement avait pour but de placer l’homme au centre de ses préoccupations. C’est durant cette période, en 1534 qu’il écrivit son roman Gargantua, dans lequel il évoque trois questions en particulier : qu’est-ce qu’une bonne éducation, qu’est-ce qu’une bonne gestion du royaume, et enfin il nous présente une utopie du meilleur lieu possible, Thélème.
Nous allons nous intéresser en particulier au prologue de ce roman, qui est le deuxième seuil d’entrée du roman, car il est précédé d’un dizain qui accueille le lecteur en insistant sur l’importance du rire. Dans son prologue, Rabelais nous donne un mode d’emploi, et nous verrons que tout d’abord qu'il s'adresse aux lecteurs, et ce, dans un deuxième temps, sous différents tons, et pour finir, nous étudierons la portée pédagogique de ce passage.
I. Une adresse aux lecteurs
Rabelais s’adresse directement aux lecteurs grâce au pronom personnel « vous » et à l’apostrophe « Buveurs… vérolés… ». Il construit ainsi une figure de lecteurs avant tout caractérisés par la convivialité mais aussi par l’abus, les deux noms « buveurs » et « vérolés » relèvent a priori de l’insulte et du blâme. Cependant Rabelais utilise aussitôt l’éloge grâce à l’adverbe intensif « très » et aux adjectifs qualificatifs mélioratifs « illustres/ précieux ». D’un côté donc, il utilise le fiel (l’insulte, le blâme) et aussitôt après le miel (l’éloge) ce qui crée un ton étonnant qui relève de ce qu’on pourrait appeler le sel, le rire. Pour finir, la négation « nul autre » donne l’impression au lecteur de faire partie d’une minorité choisie et accueillie par l’écrivain. Les trois parties suivantes du texte sont organisées de manière identique, avec une visée didactique, et une lourdeur des procédés : énumérations qui n’en finissent pas, la répétition de la conjonction de coordination à valeur adversative « mais » et même structuration pour que le lecteur comprenne bien la différence entre la manière et la matière
À partir de la deuxième ligne du texte, Rabelais passe de références populaires (« buveurs », « vérolés ») à une référence savante : Le banquet de Platon. Il utilise ensuite une première image pour décrire son œuvre : les Silènes. Rabelais commence par nous faire une définition de ce que sont les silènes mais il crée immédiateme