Rabelais était moine mais aussi médecin (l’un des meilleurs de son siècle). Tous ses romans Pantagruel, Gargantua, Le Tiers Livre et Le Quart Livre ont été saisis et brûlés. Rabelais a utilisé plus de 100.000 mots dans son œuvre. Ces mots sont pour la plupart inventés par Rabelais et ils ont, pour la plupart, disparus (ils s’opposent aux mots soigneusement analysés créés par la Pléiade).
Selon Rabelais l’Homme est un tout : un esprit et un corps qu’il ne faut pas négliger. Le corps est composé d’un haut (tête,…), mais aussi d’un bas (parties sexuelles, rectum,…). Il essaie ainsi de retrouver l’unité originelle de l’homme. Le personnage Rabelaisien apprécie toutes les aspects de la vie même les plus grossiers. Le personnage de Gargantua provient des mythes populaires en rapport avec le roi Arthur (Gargantua était un géant au service du roi Arthur).
I. Une éducation basée sur l’excès
a) Une négligence physique poussée à son extrême
• dans la toilette, le vêtement, l’exercice physique
2ème paragraphe « Peigne d’Almain », « peigner, laver, et nettoyer était perdre du temps en ce monde »
À l’époque, la toilette était rejetée (odeur de sainteté). Priorité était donnée à la prière, destinée à préparer l’âme à son Salut (le corps ne vient pas, donc est négligé). Vêtement : cf I°). Le seul exercice physique a lieu le matin, lors de la séance d’étirements (l.4 et 5).
• dans la nourriture et les excrétions :
l.12 et 13 : « belles tripes frites, belles charbonnades, beaux jambons… »
l.28 à fin : « quelques douzaines de jambons… » (accumulations de plats)
Conséquences : l.10 à 13 : accumulation de termes relatif à l’excrétion. l.27 « pissait plein urinal »
b) L’omniprésence de la matière
Exemple du bréviaire qui pèse « tant en graisse qu’en fermoirs et parchemins ». On a ici une souillure de la religion par la nourriture. de plus le poids du bréviaire compte plus et trompe sur son contenu. « Le char à bœuf » qui amène les patenôtres est un autre exemple de cette contamination de la religion par la nourriture.
c) Une éducation religieuse surdimensionnée
« Les vingt et six ou trente messes », « farat de patenôtres ». Les chapelets sont très longs mais Gargantua en dit « plus que seize ermites » qui, chacun, prient pendant 1h30, soit au total plus de 50 heures de prières, et en plus les répétitions.
Bréviaire pesant « onze quintaux, six livres »
II. Une éducation au contenu absurde et vidée de son sens
a) Absence de vie intellectuelle (car le corps est omniprésent)
Place de l’étude : « Quelque méchante demi-heure les yeux assis dessus son livre », « Son âme était en la cuisine ». Une demi-heure d’étude, soit bien moins que 50 heures de prières, ou du temps passé à manger.
b) Une vie spirituelle vidée de son sens
Prière répétée et abrutissante: Rabelais reproche le rabâchage de vieilles formules et non pas le retour à la vraie spiritualité. Critique de l’ignorance du Moyen Age. Résultats de cette éducation: exemple du “semeur”. Gargantua « marmonnait toutes ses kyrielles, et tant curieusement (=étrangement), … il n’en tombait un seul grain en terre »: ces prières sont vaines.
Le dernier paragraphe est basé sur l’humour. Comparaison est faite entre nourriture et éducation : il n’y a plus de règles ni de limites dans l’apprentissage. L’éducation n’a pas servie à l’instauration de règles.
c) Une absurdité sujet à dérision
L’absurdité de l’éducation de Gargantua est amplifiée par une accumulation de formules paradoxales ironiques :
• Le lever : Le lever décrit au 1er paragraphe est absurde : Il s’éveillait entre huit et neuf heures, fût jour ou non, or il fait toujours jour à cette heure-ci. Contradiction avec la suite « David : Vanum est vobis ante lucem surgere».
• Les vêtements : Toujours habillé en « longue robe de grosse frise fourrée de renards » quel que soit le temps, la saison…
• La durée de la journée : La journée est trop longue et sa durée dépasse facilement 24 heures.
Ex : «Trente messes», «disait plus de patenôtres que seize ermites…», soit 50 heures de prières par jour.
Conclusion
Ce passage est une critique radicale de l’éducation du Moyen Âge fondée sur le rabâchage, et donc vide de sens.