On définit communément la liberté comme la faculté d'agir et de penser sans y être contraint et sans en être empêché par quiconque ni par quoi que ce soit. En ce premier sens, nous sommes libres lorsque nous sommes indépendants, c'est-à-dire lorsque nous suivons notre bon plaisir sans qu'aucune contrainte extérieure ne vienne nous en empêcher. Une telle conception de la liberté, légitime à bien des égards, ne comporte-t-elle pas pourtant de nombreuses limites ? Car comment concilier entre elles toutes ces libertés individuelles soucieuses de leur affirmation personnelle ? Peut-on reconnaître à autrui le même droit qu'à soi sans que cela ne mette en péril la vie en commun ? Surtout, peut-on s'accommoder d'une définition de la liberté excluant tout type d'obligation interne et personnelle ?
L'enjeu de ce questionnement est de parvenir à concilier les définitions de la liberté comme émancipation de toute tutelle extérieure, c'est-à-dire comme indépendance, et comme capacité de l'individu humain de se prescrire à lui-même des lois tirées de la seule raison (autonomie). L'indépendance, autrement dit, pourrait bien s'avérer être nécessaire, mais non suffisante pour définir la liberté.
I. L'indépendance désigne la condition nécessaire de la liberté
L'indépendance désigne l'état dans lequel un individu ne dépend plus de rien ni de personne pour penser et pour agir.
a) L'indépendance de mouvement, condition de la liberté d'action
On dit ainsi que le jeune adulte quittant le foyer familial pour s'installer et subvenir lui-même à ses besoins gagne son indépendance vis-à-vis de ses parents, ou encore qu'un médecin s'installant à son compte devient indépendant d'une structure, de collègues ou de supérieurs qui auparavant pouvaient à la fois gérer son emploi du temps et lui dicter sa conduite. En ce sens, l'indépendance désigne bien la condition absolue de la liberté, comprise au sens large comme capacité de l'individu à s'affirmer comme un sujet.
b) L'indépendance d'esprit, condition de la liberté de penser
À cet égard, Descartes a montré la nécessité absolue de rompre avec les préjugés, c'est-à-dire avec toute pensée reçue de l'extérieur (parents, précepteurs, nourrices, etc.) et dont on n'a pas pris la peine d'examiner la validité. Le doute a ainsi pour fonction de remettre en question toutes les idées simplement reçues, et de reconstruire l'édifice des connaissances « en un fond qui soit tout à [s]soi », c'est-à-di