Communément, la notion de travail se rapporte à celle de pénibilité. Ainsi, jusque dans son origine étymologique, le mot « travail » suggère l’idée du supplice, de la servitude. Le temps consacré au travail par un individu dans la recherche de ce qui lui est essentiel pour vivre est synonyme d’absence de liberté. Il n’accepterait ainsi cette tâche que parce qu’elle lui apporte un revenu. C’est ce revenu qui va permettre à l’individu de se libérer des besoins qui, initialement, l’asservissent. Travailler moins c’est diminuer sa charge de travail. Cependant, vivre mieux se traduit dans la pensée générale par une augmentation du niveau de vie et un accroissement de la consommation. Or, il faudrait travailler plus pour pouvoir assumer financièrement ce surplus de consommation. Au premier abord, on ne voit donc pas pourquoi travailler moins permettrait à l’homme de vivre mieux puisque c’est son travail qui lui permet de vivre. Mais, si les individus possédaient plus de temps à consacrer à leurs loisirs, ils pourraient être libérés des contraintes imposées par le travail et, dans ce cas, ne vivraient-ils pas mieux ?
Dans un premier temps, il faut ainsi soulever la question du « vivre mieux ». Est-il synonyme de liberté et de loisirs ? Car si le travail va de pair avec aliénation, une vie de travail irait de pair avec la garantie d’un bonheur impossible. C’est pourquoi l’homme peut se poser le questionnement d’une vie libre, sans préoccupation aucune. Dans un second temps, il faut déterminer quoi faire du temps libre obtenu grâce à la baisse du temps de travail. Car les pièges tendus par les sociétés productivistes occidentales sont nombreux et ils peuvent mener l’individu à une aliénation de lui-même. La question d’un travail différent qui mènerait à un développement de l’existence se pose donc.
Une vie meilleure est-elle synonyme d’inaction, de paresse ou d’oisiveté ? Le travail en tant que labeur et souffrance, apparaît aux yeux de la société comme un standard et l’homme se retrouve aliéné par l’outil de production. Sa condition humaine est-elle encore complète ou n’est-il plus qu’un prolongement de la machine ? Ne risque-t-il pas de perdre son essence dans le travail ? Cette négation totale de l’individu dans l’acte productif justifie pleinement la vocation de travailler moins. L’effectuation répétée d’une même tâche conduit à une forme d’abrutissement de celui-ci. Tel un Sisyphe, l’ouvrier dit « spécialisé » peut se poser la question de l’atteinte du bonheur. Sa situation apporte tristement la réponse : il est condamné à subir la tristesse répétitive de la condition humaine. Dans Les temps modernes, Charlie Chaplin met une image sur toutes ses considérations, et explicite les travers du Fordisme et de la spécialisation du travail.
Dès lors, l’idée de passer moins de temps à effectuer chaque jour la même tâche paraît beaucoup moins contestable. La liberté de ne rien faire, de vivre sa vie au fil d’une certaine inaction, d’une badauderie paraît attrayante. Mais il ne s’agit pas là de mettre en valeur une forme de « paresse autorisée ». Pourquoi ne pas récuser les tourments et protocoles préétablis par l’homme pour vivre une vie simple et austère, la plus proche possible de la nature ? Cette abnégation des contraintes et de la prétention économique, politique et sociale est finalement peut-être la condition du vivre-mieux.
Afin de déterminer si la baisse du temps de travail peut être réellement profitable aux individus, la question de l’occupation du temps libéré se pose. L’homme doit prendre garde à ne pas tomber dans le conformisme et à ne pas adopter un comportement grégaire. En effet, le temps libéré risque d’être vécu comme ennuyeux s’il n’est pas occupé correctement. Mais la solution proposée par la société n’est pas nécessairement la bonne. En effet, la réponse avancée est « toute-faite ». Cette séduisante solution « clé en main » contre l’ennui risque de déposséder celui qui l’utilise de sa propre personnalité. Les spectacles stéréotypés, les rencontres sportives capitalisées, les émissions télévisuelles sensationnalistes se proposent de remplir un temps vide, de permettre aux esprits de s’éclipser voire de faire rêver ceux qui y assistent, en vrai ou, pire encore, à travers le prisme d’un écran. Les issues mises en avant contre cette crainte de l’inoccupation comportent le risque du conformisme social et sociétal.
Néanmoins, travailler moins prend encore plus de sens si le temps libéré est consacré à la mise en œuvre d’un travail différent. Comment vivre pleinement son temps libre afin de lui donner un sens et une valeur ? Ainsi, le temps libre peut être consacré à une forme de travail fondamentale qu’est la construction libre et assumée de soi. Tous les travaux artistiques, intellectuels ou spirituels nécessitent également un effort, une volonté, afin d’arriver à un but, une finalité. Ces différents efforts permettent de produire l’œuvre de sa vie. Sans se complaire dans le narcissisme, il s’agit, par un travail sur soi, de construire philosophiquement son existence, et ce de manière lucide et éclairée. Cette existence comporte plusieurs caractéristiques telles que le respect d’autrui, la responsabilité de ses opinions et actes ou la constance en des valeurs. Ce cheminement conduit l’individu qui le suit à un mieux-être et, par conséquent, à un mieux vivre.
Oisiveté et repos restent mal perçus dans les sociétés occidentales où seule la productivité compte. Ces deux notions se trouvent cependant réhabilitées par une volonté sociale nouvelle du coup moins contestable. La liberté de ne rien faire, de vivre sa vie au fil d’une certaine inaction, d’une badauderie paraît attrayante. Mais il ne s’agit pas là de mettre en valeur une forme de « paresse autorisée ». Pourquoi ne pas récuser les tourments et protocoles préétablis par l’homme pour vivre une vie simple et austère, la plus proche possible de la nature ? Cette abnégation des contraintes et de la prétention économique, politique et sociale est finalement peut-être la condition du vivre-mieux.
Afin de déterminer si la baisse du temps de travail peut être réellement profitable aux individus, la question de l’occupation du temps libéré se pose. L’homme doit prendre garde à ne pas tomber dans le conformisme et à ne pas adopter un comportement grégaire. En effet, le temps libéré risque d’être vécu comme ennuyeux s’il n’est pas occupé correctement. Mais la solution proposée par la société n’est pas nécessairement la bonne. En effet, la réponse avancée est « toute-faite ». Cette séduisante solution « clé en main » contre l’ennui risque de déposséder celui qui l’utilise de sa propre personnalité. Les spectacles stéréotypés, les rencontres sportives capitalisées, les émissions télévisuelles sensationnalistes se proposent de remplir un temps vide, de permettre aux esprits de s’éclipser voire de faire rêver ceux qui y assistent, en vrai ou, pire encore, à travers le prisme d’un écran. Les issues mises en avant contre cette crainte de l’inoccupation comportent le risque du conformisme social et sociétal.
Néanmoins, travailler moins prend encore plus de sens si le temps libéré est consacré à la mise en œuvre d’un travail différent. Comment vivre pleinement son temps libre afin de lui donner un sens et une valeur ? Ainsi, le temps libre peut être consacré à une forme de travail fondamentale qu’est la construction libre et assumée de soi. Tous les travaux artistiques, intellectuels ou spirituels nécessitent également un effort, une volonté, afin d’arriver à un but, une finalité. Ces différents efforts permettent de produire l’œuvre de sa vie. Sans se complaire dans le narcissisme, il s’agit, par un travail sur soi, de construire philosophiquement son existence et ce de manière lucide et éclairée. Cette existence comporte plusieurs caractéristiques telles que le respect d’autrui, la responsabilité de ses opinions et actes ou la constance en des valeurs. Ce cheminement conduit l’individu qui le suit à un mieux-être et, par conséquent, à un mieux vivre.
Oisiveté et repos restent mal perçus dans les sociétés occidentales où seule la productivité compte. Ces deux notions se trouvent cependant réhabilitées par une volonté sociale nouvelle de reconnaître la stérilité et la pénibilité de certaines tâches. Ne pourrait-on pas vivre librement, sans se préoccuper des exigences sociétales actuelles qui sont dans un processus de recherche perpétuelle d’une forme d’occupation de l’esprit ? Mais, en partant d’un point de vue conceptuel, le travail en tant que recherche et développement de soi peut être perçu comme le facteur d’un épanouissement personnel. Ainsi, si l’on évite les pièges tendus par la société des loisirs, on peut donner un sens au temps libéré et arriver à construire son existence. En définitive, travailler moins c’est vivre mieux, si et seulement si, l’être humain qui prend cette décision possède en lui-même la force de vivre et d’exister entièrement.