Présentation du texte
Fréderic de Prusse, esprit cultivé (ou éclairé) fait très tôt connaître à Voltaire son désir d’entrer en relation épistolaire avec lui (Fréderic a 24 ans, en 1736 et ne sera couronné roi de Prusse qu’en 1740). Enchanté par les avances flatteuses du futur roi de Prusse, Voltaire lui répond de Cirey. Le 26 aout 1736, par une lettre dans laquelle se dessine, sous les flatteries du courtisan, le portrait du « despote éclairé » qu’il pressant déjà en Fréderic (un monarque autoritaire mais cultivé).
I. Les flatteries du courtisan
1. L’expression conventionnelle de la politique de la cour
Celle ci se manifeste à travers certaines formulations établies par l’usage et les circonlocutions (expressions recherchées, un peu « ampoulées »), « monseigneur » (ligne 8). L’emploi des impératifs confère à cet extrait une connexion respectueuse propre au langage de la littérature épistolaire: « souffrez » (denier, agréer) (ligne 1), « croyez » (ligne 3), « soyez sur » (ligne 10), le recours à la périphrase qui se substitue aux termes simples « des actions de grâce » (ligne 2) (connotation religieuse : c’est un remerciement), « les hommes qui pensent » (ligne 14) (philosophe). L’emploi du pluriel pour le singulier (pluriel emphatique): « ses états » (ligne 7), « vos peuples » (ligne 12), l’atténuation par la double négation « il n’y a point d’homme sur la terre qui doivent des actions de grâce » (lignes 1-2), « tous les hommes sur la terre… ». (lignes 6-7) : « il n’y a point de phrase… qui ne puisse… » « Vous êtes un prince qui va ramener l’âge d’or ». L’art du détour, sensible à travers les nombreuses incises du texte : « par la sainte philosophie » (lignes 2-3), « qui, en pensant ainsi » (ligne 6). Toutes ses formes de politesse sont autant de courbettes (flatteries) par écrit. Le ton de la lettre se rapproche beaucoup de l’art de la conversation, « Souffrez que je vous dise… » (ligne 1), il aurait pu dire « non … que je vous écrive… », mais c’est surtout les soucis de plaire et de flatter qui domine au dépend du naturel.
2. L’expression fleurie du courtisan flatteur
Voltaire manie l’hyperbole avec insistance : « il n’y a point d’homme sur la terre » (ligne 1), « adoré de vos peuples et chéri du monde entier » (lignes 11-12). « Un si divin caractère » (ligne 11). L’hyperbole donne une envergure immense, universelle au futur Fréderic II, accentuée par la répétition de « il n’y a point » aux lignes 1 e