Il est courant d’entendre le proverbe “Le travail, c’est la santé !” mais ce proverbe est souvent associé à un autre “ne rien faire c’est la conserver”. Le travail permet-il aux travailleurs de garder une bonne santé ? Ou au contraire nuit-il à la bonne santé des travailleurs ? Le travail est une activité de production qu’accomplit l’homme au service de la satisfaction des besoins de chacun. Être en bonne santé veut à la fois dire avoir un bon fonctionnement de l’organisme mais être en bonne santé veut aussi dire avoir un bien-être physique, mental et social. On pourrait d’abord penser que le travail est une activité à connotation négative pour l’homme car étant à l’origine d’une malédiction divine due à la transgression originelle, l’homme ayant alors été condamné par Dieu à manger son pain qu’il obtiendrait « à la sueur de son visage ». L’homme s’est donc vu contraint de fournir un effort physique “la sueur” pour obtenir sa rétribution “son pain”. Si le travail demande un effort physique conséquent peut-on alors dire qu’il contribue à la bonne santé de l’homme ?
Néanmoins, Adam voyant le fruit de ses efforts, ne s’est-il pas senti fier de sa tâche accomplie ? De même, l'agriculteur qui sème puis récolte ne se sent-il pas reconnaissant ? Dans ce cas, le travail n’est-il pas une activité dans laquelle l’homme peut s’épanouir et qui contribuerait donc à sa bonne santé? On le devine, se demander si le travail c’est la santé c’est au moins suggérer qu’il n’en va pas ainsi pour tout travailleur d’où l'enjeu de ce sujet qui est d'interroger nos croyances sur le travail et la santé. Pour résoudre notre problème, nous procéderons en deux temps. Après avoir montré que le travail peut être synonyme de santé nous démontrerons qu’il peut à l’inverse être nuisible à la santé de l'homme.
I. le travail est au départ synonyme de santé
A l’origine du travail est une malédiction divine, celle imposée à Adam et Eve ayant bravé l’interdit dans le jardin d’Eden. Adam alors condamné pour le péché original s'est vu obliger de cultiver la terre "à la sueur de son front" pour pouvoir se nourrir. L'homme ne peut pas vivre sans se nourrir, sa bonne alimentation contribue donc à sa bonne santé. Adam, en cultivant les terres pleines de ronces du jardin d’Eden, a donc pu se nourrir avec Eve pour rester en vie donc en bonne santé.
A l’époque actuelle, le travail d’Adam se retrouve dans le travail des agriculteurs qui grâce à leur activité agricole contribue à nourrir la population du monde entier et donc de garder l'humanité en bonne santé. Le travail peut aussi être source d'épanouissement lorsqu'il permet à l'homme d'être reconnu, respecté ou aimé. Ainsi, le médecin ayant soigné son patient, le scientifique ayant trouvé un remède ou un vaccin, l’enseignant ayant contribué à la réussite de ses élèves, le juge ayant rendu justice, ne seront-ils pas gratifiés de leur travail ? Si tel est le cas, cela contribuera nécessairement à leur bien-être moral et donc à leur santé.
Le travail peut aussi permettre au travailleur de développer ses relations sociales, il n’est pas rare que des travailleurs fassent des rencontres amicales ou amoureuses sur leur lieu de travail. En plus de répondre à ses besoins primitifs, l’homme étant le plus démuni de tous les animaux, le travail est devenu aussi un moyen pour l’homme de répondre à ses besoins personnels, de se faire plaisir et de faire plaisir aux autres grâce à sa rétribution.
Enfin il est fréquent d’entendre “la santé n’a pas de prix” or il s’avère qu’elle en a un. Dans certains pays sous-développés mais aussi aux États-Unis, première puissance économique mondiale, la santé a un prix, les travailleurs américains consacrent une grande partie de leurs revenus issus du travail pour accéder aux soins. Le travail et la santé sont économiquement liés aux États-Unis.
Par conséquent bien qu’imposé comme châtiment à l'homme dans la tradition judéo-chrétienne, le travail lui a permis d'être une source d'épanouissement à la fois sur le plan moral, social et financier permettant un bien-être à la fois moral et physique contribuant à la bonne santé de l'homme.
II. Mais en étant trop présent, il devient nuisible à la santé de l'homme
Selon Jean-Jacques Rousseau, la paresse est dans la nature de l’homme, l’activité est une peine de l’homme civilisé, selon lui, le travail est contre nature. Il en vient donc à se questionner sur les bénéfices du travail sur la santé de l’homme.
La nature du travail a évolué, le travail n’est pas toujours lié à la production d’un objet concret. Le rapport au travail a changé. Ce changement a eu un impact sur la santé des travailleurs. Aujourd’hui, le travail ne consiste plus uniquement en une activité physique répétitive mais peut aussi consister en une tâche immatérielle qui va nécessiter moins d'engagement physique mais qui va demander une disponibilité mentale plus importante.
La nature du travail peut donc avoir des conséquences physiques ou mentales sur l’homme, l’ouvrier qui exerce une tâche répétitive ou difficile aura des conséquences d'ordre physiques alors que le commercial à qui l'on demandera de faire toujours plus de chiffre aura des conséquences d'ordre mentales sur sa santé mais qui pourront néanmoins avoir des conséquences sur le corps.
Sur le plan social, le travail peut aussi porter atteinte à la santé. Il n’est pas rare de voir des relations conflictuelles sur le lieu de travail qu’elles soient entre collègues ou entre les travailleurs et leur supérieur hiérarchique. Il peut aussi s’agir d’un manque de reconnaissance à l’égard du travailleur. Ces situations peuvent être source de stress pour le travailleur qui en verra sa santé dégradée.
III. L'homme doit être acteur de son travail, sinon il en devient captif
Ce qui fait donc que le travail est libérateur au départ, en donnant à l'homme l'autonomie, la santé, une stabilité sociale se retourne contre lui dès lors qu'il ne peut s'échapper du travail, et que le travail devienne dès lors aliénant. Comment s'assurer alors que le travail ne rende pas l'homme captif de celui-ci, et en ruine sa santé mentale et physique ?
Il est nécessaire pour l'homme de donner des limites à son travail. Avec l'âge le travail devient de plus en plus pénible et difficile à endurer. Les systèmes de retraites, en permettant aux jeunes générations de cotiser pour les générations les précédents, évitent ainsi de rendre le travail trop usant. Même pour les actifs, en plein possession de leur moyen, des limites d'horaires et de temps de travail évitent les problèmes de "burn-out", où le travail devient tellement pesant que le corps et l'esprit ne peuvent plus suivre.
Outre une limite en âge et et en volume, on peut faire la distinction entre un travail ne donnant qu'un salaire, et celui produisant un capital. On ne peut avoir la même motivation ou le même horizon de vie, lorsqu'on travail juste pour la fin du mois, ou bien pour se bâtir un patrimoine, que l'on peut en outre léguer aux générations futures. L'artisan qui développe sa propre entreprise, qui est son propre patron, est ainsi dans une situation bien différente que l'employé de chantier, qui obéit à des ordres du matin au soir, sans voir sur le long-terme le cumul du fruit de son travail. C'est cette séparation entre le capital et le travail qui a amené Marx, dans le Capital, à dénoncer l'injustice du capitalisme et l'exploitation des classes travailleuses, notamment l'ouvrier, par le patron auquel revient le bénéfice. Il faut ainsi penser à partager ses bénéfices, sans quoi le travail ne rend le travailleur que captif du capital sur le long-terme.
Conclusion
En conclusion, le travail peut être bon pour la santé s’il est source d’épanouissement et qu’il offre une forme de reconnaissance à l’homme. Il peut toutefois s’avérer être nuisible à la santé physique et/ou morale de l’homme. Le travail doit avoir ainsi des limites d'âge et de volume, pour rester supportable, mais aussi sur le long-terme offrir un juste partage des bénéfices qu'il procure, pour que chacun puisse être détenteur et non captif de celui-ci. Aussi, dans la société actuelle de consommation, il convient de s’interroger sur la santé de l’homme au travail mais aussi sur le sens de ce travail. Dans une société ou l’homme consomme de plus en plus, il doit également produire de plus en plus, ce qui a incontestablement des conséquences sur sa santé, sans pour autant le rendre plus heureux.