Eléments pour l'introduction
L’homme est un être social. A ce titre, il est quotidiennement confronté à ses semblables, les « autres », individuellement et collectivement dénommés « autrui », celui envers lequel il éprouve des sentiments divers qui vont du rejet à l’attirance. Ainsi établit-il avec autrui un rapport complexe qui prend des formes multiples: indifférence, stricte politesse, domination, respect, amour, amitié.
Dans chaque type de rapport à autrui s’expriment les traits fondamentaux de sa personnalité. Tout rapport qui s’établit entre « lui » et « moi » est révélateur de ce qu’ « il » est comme de ce que « je » suis. Mais chacune des formes de rapport à l’autre ne fait pas appel aux mêmes dispositions, aux mêmes qualités, ne mobilise pas les mêmes ressources d’intelligence et de cœur.
De tous les rapports à autrui, l’amitié est certainement la forme qui demande les plus grandes qualités morales. Les philosophes grecs, parmi lesquels Aristote, avaient fait d’elle une vertu sur laquelle repose les fondements de la cité. Elle est en effet celle qui exige le plus d’oubli et de don de soi, celle qui demande le plus d’assiduité dans la compréhension et le plus de constance des sentiments ; elle est aussi la plus « équilibrée » pour ce que chacun donne et reçoit. Cependant, au fil des siècles, si certains penseurs ont fait son éloge et en ont fait le modèle du rapport à autrui, d’autres plus critiques, en ont dénoncé le caractère illusoire.
C’est ainsi que l’on a pu poser la question : « l’amitié est-elle la forme idéale du rapport à autrui? » Encore faut-il s’entendre sur le sens donné à « la forme idéale » ? Dans ce qui suit, nous la considèrerons comme la forme de rapport aux autres qui correspondrait le mieux aux aspirations d’humanité de l’homme.
Eléments pour la Première partie : (L’amitié est la forme idéale du rapport à autrui.)
De prime abord, l’amitié peut en effet apparaître comme la forme de rapport à autrui idéale, celle vers laquelle nous devons tendre, dans la mesure où elle est une authentique relation d’égal à égal, entre « moi » et quelqu’un qui m’apparaît comme un « autre moi-même », une relation, fondée sur la confiance et la réciprocité, qui me permet de le connaître, de le comprendre et de l’accepter tel qu’il est, tout comme cet « autre moi-même » le fait à mon égard.
En effet, l’amitié repose sur l’intérêt pour autrui. Si je suis égoïste, sans intérêt pour l’autre, essentiellement c