Le désir est-il par nature illimité ?
Avertissement : il ne s’agit ici que de pistes de réflexion et non d’une copie type nécessairement attendue par vos correcteurs. D’autres approches, d’autres thèses et arguments sont possibles.
Introduction / Problématisation
Le désir est le sentiment d’un manque, accompagné de la conscience de l’objet de ce manque et de la tendance qui nous pousse à le combler. Il est caractéristique de l’homme à tel point qu’une vie sans désirs n’en est pas véritablement une à nos yeux.
L’association entre désir et absence de limite donne lieu à trois interprétations possibles. En premier lieu, le désir peut être dit illimité au sens où il ne s’arrête jamais d’advenir : même quand il est provisoirement satisfait, il finit par renaître. De plus, le désir est illimité dans la mesure où il fait en sorte que ce que nous pouvions considérer à première vue comme une limite mise à notre action ou à notre condition d’homme ne le soit de sorte que nous la refusions pour la dépasser. Enfin, le désir implique aussi l’illimitation, car il est souvent synonyme d’excès et de démesure et pousse l’homme à agir au-delà de ce qu’il serait raisonnable de faire. Autrement dit, il abolit le sens de la limite.
Nous devons cependant nous interroger pour savoir si, par nature, le désir représente nécessairement tous ses aspects à la fois, car, dans ce cas, cela signifierait qu’il est à la fois privilège et menace, puissance créatrice et destructrice. Ne peut-on pas penser un usage possible du désir permettant de dissocier « illimité » et démesuré ?
Partie I.
Le désir est, par nature, sans limite.
« Le désir est l’essence de l’homme », affirme Spinoza. C’est une puissance, une force qui le pousse à agir. À la différence du besoin, le désir n’est souvent pas satisfait même quand il est comblé. Séduire telle femme comble le désir que Don Juan avait pour elle sans satisfaire son désir amoureux. De même, et le gourmand le sait bien, la satiété qui met fin au besoin physiologique de manger, n’éteint pas le désir de nourriture. C’est pourquoi on peut dire que le désir est illimité. Il renaît sans cesse, ne s’éteint jamais quoi qu’il obtienne.
La force du désir est telle qu’elle rend possible ce qui, à première vue, semblait impossible. La réalité représente la limite par excellence et sous toutes ses formes. Nous sommes limités en temps, en forces, en capacités, etc. Or, le désir se caractérise souvent par son refus de la réalité telle qu’elle est et pousse l’homme à la dépasser ou la transformer. En ce sens, le désir ne s’accommode pas des limites.
Partie II.
L’illimitation du désir est source d’excès.
Le désir est donc doublement illimité : il exige toujours autre chose et il nous entraîne à dépasser nos limites. Mais, cette illimitation représente une source d’excès. Comme Platon en donne l’image dans Gorgias, une vie uniquement placée sous l’égide de la satisfaction des désirs semble vaine et dangereuse. Vaine, car elle s’apparente à remplir indéfiniment un tonneau percé. Dangereuse, car, en raison de l’insatisfaction ressentie, elle encourage les excès : la frustration, la déception engendrée par la soumission aux désirs invite à tenter d’en obtenir toujours plus. Comme un malade qui croit qu’il faut augmenter la dose du médicament pour continuer à profiter de ses bienfaits. Puissance créatrice, le désir représente aussi une force destructrice. L’homme peut littéralement se consumer de désirs au point d’abolir sa raison et de le laisser sous l’emprise de ses passions.
Le désir mène l’humanité à une démesure dont les Grecs avaient fait l’objet de plusieurs mythes. L’homme se prend souvent pour l’égal des Dieux. C’est le désir qui le conduit à « vouloir se rendre comme maîtres et possesseurs de la nature » (Descartes). Il ne se contente pas, en effet, de modifier son environnement pour assurer son besoin de survie comme l’animal le fait (un castor construisant un barrage par exemple) mais il veut le rendre conforme à son désir et le produire à son image quitte à en menacer l’existence même. Ce désir apparaît ici illimité, d’autant plus que la prise de conscience par quelques-uns de l’imminence des catastrophes écologiques ne suffit pas à limiter le désir de maîtrise et de puissance de l’humanité en général. Comme si celle-ci devenait le propre jouet de son désir et qu’elle ne parvenait plus à en contenir l’expression.
Partie III.
Nous pouvons régler notre désir.
L’illimitation du désir est-elle pour autant une fatalité comme semble l’indiquer la mention « par nature » ? Il faut apprendre à désirer pour en éviter les excès. Ne nous méprenons pas sur la finalité d’un tel apprentissage : il ne s’agit nullement d’éteindre en nous la flamme du désir pour nous concentrer uniquement sur nos besoins, mais de faire en sorte de désirer ce dont l’obtention dépend le plus de nous. Ainsi, nous serons certains d’éprouver la joie et le plaisir de réaliser nos désirs. Ce n’est pas parce que le désir est raisonnable que la joie prise à l’accomplir est restreinte et limitée.
Il est possible de ne cultiver que l’aspect créateur du désir et de se protéger des excès dont il est capable. Pour ça, il faut tourner ses désirs vers soi-même. Plutôt que chercher la reconnaissance des autres que je ne suis jamais sûr d’obtenir et qui, pour cette raison, pourrait me pousser à l’excès (excès d’excentricité, de générosité, d’attente vis-à-vis des autres, etc.), il est, par exemple, préférable, de désirer faire tout ce qui est en notre pouvoir pour parvenir à l’estime de nous-mêmes. Et, comme le fait remarquer Descartes à la Princesse Élisabeth, ce désir ne sera jamais excessif et l’estime de soi qu’il procure est, pour le coup, sans limites. Elle est durable et rien ne peut l’atteindre.
Conclusion.
Illimité par nature, le désir n’est pas pour autant nécessairement démesuré si on apprend à le régler. Reste que cette approche concerne les individus davantage que l’humanité en elle-même. Or, la démesure du désir humain par rapport à la Terre, désir fou de maîtrise symbolisé par le règne d’une technique toujours plus envahissante, ne nous fait-elle pas douter de notre capacité à en contrôler les excès ?
Copie bac
Est ce correct si on a considéré que c la société qui rend le désir illimité et qu'on a évoqué l'État de nature de Rousseau ou le désir n'est pas illimité c'est a dire démesure ?
J'ai considéré e' quelque sorte l illimité du désir propre a l'être social.....